La phobie de la maladie mène au syndrome d’Angelina Jolie


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  • Le syndrome d’Angelina Jolie est caractérisé par une forme extrême du Healthism. Le Healthism qu’on connait comme le Santisme désigne un culte de la santé, de l’alimentation et de la beauté qui tourne à l’obsession. Tout individu qui ne rendre pas dans le moule du santisme est rejeté par la société.


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    Le Healthism (santisme) ou le syndrome d'Angelina Jolie

    La politisation et la commercialisation de problèmes de santé dans la culture occidentale moderne ont conduit à un Healthism croissant. On n’a pas encore d’équivalent français pour ce néologisme même s’il y a des propositions pour le Santisme. Le santisme implique que la santé est plus importante que tout le reste et que la fin justifie les moyens. Le Santisme couvre le culte du corps, de la beauté et d’une perfection parfaits dans tous les aspects. Le moindre défaut dans le corps et l’esprit est considéré comme une imperfection indigne de l’être humain. Le santisme s’articule autour de l’idée impérative du comportement d’auto-préservation.

    C’est une approche critique de tout ce qui ne rentre pas dans les normes glamour d’un corps beau, jeune et mince. Dans les formes extrêmes, le santisme est proche de l’eugénisme, qui sélectionne une hérédité correcte. Mais même de simples préoccupations sur les normes de la condition physique peuvent provoquer une hypercorrection. On peut citer la chirurgie sur un corps totalement en bonne santé selon Evgenia Golman, maître de conférences à la Faculté des sciences sociales du Département de sociologie générale du HSE dans son article publié dans le Journal of Social Policy Studies.

    Le syndrome d'Angelina JolieLe syndrome d’Angelina Jolie a été souvent mentionné récemment dans les médias et il caractérise une attention accrue à la probabilité de maladies dangereuses. Il en résulte non seulement dans la surveillance vigilante de la santé, mais aussi dans les tentatives pour empêcher des maladies hypothétiques et cela inclut une intervention chirurgicale sur un corps sain. Le célèbre cas de l’actrice, qui a subi une mastectomie préventive, est symptomatique de cette obsession et il s’inscrit dans le concept du santisme. Le fait de subir une mastectomie préventive est aussi absurde que si on disait qu’il faut que 4,7 % de la population française s’ampute les jambes parce que 4,7 % des personnes risquent le diabète.

    Cependant, l’histoire d’Angelina Jolie est une manifestation extrême de la nouvelle compréhension de la santé. Le santisme puise ses racines dans le boom de la nutrition, de la forme physique, de la chirurgie plastique et de la nourriture organique. On a également la popularité des applications mobiles pour la surveillance de la santé. Un tel culte du corps est largement soutenu par les salons de beauté, les fabricants de suppléments bioactifs et des centres de nutrition, d’activité physique et de yoga et même des responsables de santé dans de nombreux pays.

    La politique moderne de la santé a provoqué une migration de la responsabilité des établissements de soins aux individus eux-mêmes et déplace l’intérêt du traitement à la prévention, notamment dans la prévention des pathologies même si ces dernières sont purement hypothétiques selon Evgenia Golman.

    La médecine préventive aide sans aucun doute à prévenir de nombreuses maladies et permet d’économiser beaucoup de ressources pour les familles et l’Etat. Mais si le calcul des maladies et l’idéalisation de la beauté et des normes du corps sont mal compris et qu’on les exploite de manière purement commerciale, alors ils peuvent conduire à une névrose de masse et une obsession sociale conforme à la mode santiste. Et cet Healthism obsessionnel peut mener vers une chose terrifiante qu’on avait uniquement vue pendant les heures les sombres de notre histoire. La stigmatisation et son rejet par la société de toute personne qui ne cadre pas avec le modèle prôné par le Santisme.

    La folie de la santé conduit à la névrose et à la discrimination

    La santé est en train de devenir un impératif social et moral et l’insalubrité peut devenir une source de stigmatisation selon Evgenia Golman. En d’autres termes, une volonté raisonnable de rester en bonne santé est effectuée à des niveaux absurdes dans le discours public, notamment dans les médias de masse. Un corps jeune, beau et mince est devenu non seulement un culte glorifiant, mais une mesure de la situation socio-économique d’un individu et même de sa valeur pour la société. Tout ce qui ne rentre pas dans les normes du Santisme (par exemple, un poids excessif, mais pas forcément obèse) peut devenir un objet de discrimination.

    De plus, le santisme prend de l’ampleur à l’échelle mondiale. Une telle politique provoque trop d’incitations allant du culte de la société de consommation jusqu’à la concurrence sur le marché du mariage en passant par les rôles de genre des femmes. Et ces croyances sont en train d’infecter les politiques de soin de nombreux pays. Golman met l’emphase sur ces sources du santisme et on peut citer la politisation de la santé, la faisabilité économique de la baisse des coûts des soins de santé, les transformations sociales, le culte de l’individualisme ainsi que la médicalisation de la vie quotidienne. Tous ces facteurs font que la santé est devenue un style de vie prestigieux et nécessaire.

    Et c’est raisonnable si on en reste là. Mais dans ses formes extrêmes, le santisme se transforme en une surveillance régulière du corps de l’individu. Une personne surveille chaque manifestation corporelle de manière obsessionnelle, mais il commence aussi à détecter des signes de maladies imaginaires. Une telle attitude peut être positive, car cela incite à être prudent quand on mange par exemple. Mais quand cette surveillance est idéalisée, alors elle peut provoquer une panique morale et le sentiment de vulnérabilité somatique.

    Une apparence malsaine peut provoquer une discrimination sociale

    Si la compréhension santiste de la santé devient populaire dans une société, alors cela peut provoquer une évaluation morale d’un individu en fonction de son implication dans certaines pratiques (un mode de vie sain par exemple).

    Et une telle évaluation peut influencer les établissements de soins et la communication avec l’individu. Moins une personne sera conforme aux normes du santisme et plus elle sera évaluée négativement par la société. Et il suffira d’avoir un jugement négatif sur son apparence ou son mode de vie pour que cela se répercute immédiatement sur ses aptitudes personnelles et professionnelles. Par exemple, remarquez comment les obèses sont accusés d’avoir une mauvaise hygiène et de sentir mauvais alors que l’excès de poids n’a rien à avoir avec l’hygiène d’une personne.

    Le santisme touche principalement les femmes

    Dans le modèle traditionnel de la famille, les femmes portent la responsabilité de se soucier du bien-être et la santé de la famille. Ce modèle est complété avec les impératifs de santisme, qui est particulièrement populaire chez les femmes et dicte les normes de la beauté et de la santé.

    La double pression des stéréotypes de genre et des canons santistes favorise un sentiment de culpabilité et de stress chez les femmes selon cette experte. Et comme le contexte concerne le lien entre la santé avec la beauté, alors on voit une fusion entre les catégories internes du corps (fonctionnement des organes) et l’organisme externe. En conséquence, l’objectif de la santé est de se sentir bien, mais également de bien paraitre.

    Le Santisme ne concerne pas la personne, mais le patient

    Les nouvelles technologies médicales sont devenues un objectif en soi. Leur pénétration dans les différentes sphères de notre vie a entraîné une nouvelle médicalisation de la vie quotidienne. On peut citer la médecine de surveillance développée au cours du 20e siècle. Un tel modèle de santé exige la dissolution des catégories cliniques distinctes entre la maladie et la bonne santé, car le santisme tente de mettre tout le monde au même niveau selon Evgenia Golman. Elle cite le sociologue britannique David Armstrong. Cette surveillance augmente le nombre de technologies et de médicaments utilisés quotidiennement. Cela signifie qu’une personne n’est plus une personne, mais un patient en permanence même s’il n’a aucune maladie.

    La médecine de pointe utilise souvent des probabilités en essayant de calculer les menaces possibles à l’avance. Cela conduit à l’apparition de patients sans symptômes (un terme du sociologue britannique Andrew Webster). Néanmoins, cette pratique mène à une surveillance constante de la santé tout au long de la vie.

    Et le mode de vie santiste bénéficie d’un succès commercial phénoménal. Par exemple, on a des bracelets de fitness qui sont très populaires. Ces bracelets surveillent le niveau d’activité physique et la qualité du sommeil. D’autres applications mobiles ont des objectifs similaires.

    D’une façon ou d’une autre, l’une des conséquences d’un tel culte de la santé est que les personnes en surpoids ou les couches sociales vulnérables, qui ne peuvent pas se payer des remises en forme, sont immédiatement exclues. On a également les personnes handicapées qui sont touchées par cette exclusion. En ces termes, la chercheuse souligne que le santisme est proche de l’eugénisme. Ce dernier élève la santé à un niveau patriotique et de respectabilité aux yeux des autres. Et la réaction en chaine est brutale et immédiate. L’eugénisme mène à la ségrégation, l’âgisme et le racisme.

    Le santisme est très proche de l’eugénisme

    Les similitudes entre la nouvelle conscience de la santé et l’eugénisme sont particulièrement visibles sur les questions éthiques de la nouvelle génétique, notamment celle qui est liée aux tests des embryons selon Golman. Si on trouve des troubles génétiques dans les embryons, alors cela augmente les avortements de manière exponentielle. Le problème est que la médecine est sous la menace de changer son orientation de rôle thérapeutique d’éliminer tout ce qu’il ne peut pas guérir. Cette chercheuse rejoint l’opinion de David Le Breton, sociologue et anthropologue français.

    Le développement de la nouvelle génétique permet également un génie génétique lié à la détection de mauvais gènes qui sont responsables de certaines maladies. Et cette nouvelle génétique promet de supprimer ces gènes. De cette manière, le santisme va affecter chaque aspect de l’individu allant de ses gènes jusqu’à son visage qui doit être aussi lisse et parfait que les magazines de mode.

     

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

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