Entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, le choix est vite fait


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  • La Réalpolitik, la logistique, le potentiel des marchés de l’Asie centrale fait que tout le monde ferme des yeux navrés sur l’Arménie et laisse faire l’Azerbaïdjan.


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    La Réalpolitik, la logistique, le potentiel des marchés de l'Asie centrale fait que tout le monde ferme des yeux navrés sur l'Arménie et laisse faire l'Azerbaïdjan.

    Le conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie s’est intensifié au cours des derniers jours. Les tensions ont commencé dès le mois de mars 2022, car les Azéris ont estimé que la Russie, qui est la principale garante de la paix au Nagorno-Karabakh, est trop occupée avec sa guerre en Ukraine pour mener deux fronts en même temps. Même si dès mars 2022, Sergei Shoigu, le ministre de la Défense russe avait déclaré qu’il ne fallait pas sous-estimer la Russie et qu’elle pourrait gérer plusieurs théâtres d’opération en même temps.

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    Les débiles et les ânes bâtés vont s’empresser de hurler que c’est une guerre entre chrétiens et musulmans. Même si l’Arménie est principalement chrétienne et l’Azerbaïdjan, principalement musulmane, la guerre religieuse est la dernière des raisons fantasmagoriques. Dans le nouveau monde qui arrive, la conquête de territoires est devenue une norme. La guerre russe en Ukraine est une conquête de territoire pour sécuriser l’accès de la Russie à la Mer Noire et les Azéris en profitent pour arracher davantage de territoires à l’Arménie pour pouvoir se connecter plus facilement et directement avec la Turquie.

    Le plus grand malheur pour les arméniens est que leur seule ressource est leur persécution qui dure depuis des siècles. S’ils avaient du pétrole, du gaz, des céréales ou du charbon, alors tout le monde serait accouru pour secourir les “malheureux” Arméniens, mais comme ils n’ont que leurs larmes à monnayer, ça n’a pas beaucoup de valeur dans les marchés de la géopolitique internationale.

    Ces dernières années, Baku est devenue une pièce maitresse pour la Chine. L’Azerbaïdjan est un engrenage essentiel pour les Nouvelles Routes de la Soie. Baku a investit énormément dans les voies ferrées, les terminaux maritimes sur la Mer Caspienne et aujourd’hui, la conclusion est simple, l’Azerbaïdjan est la route la plus rapide pour que les biens chinois arrivent en Europe en passant par la Turquie. Et comme la Chine ne s’ingère jamais dans les affaires intérieures des autres pays, alors du moment que les affaires et les trains arrivent à bon port, le dragon y trouve son compte.

    Pour l’Inde et l’Iran, c’est une autre histoire et même si la probabilité est faible, ils peuvent devenir des alliés de l’Arménie. Quand en 2020, l’Azerbaïdjan a conquis une grande part du Nagorno-Karabakh, le Azéris ont eu l’ivresse de la victoire, mais l’Inde et l’Iran étaient tout sauf d’accord avec ce merdier. L’Inde possède l’INSTC, un corridor qui est l’équivalent des nouvelles routes de la soie avec l’objectif de connecter New Delhi à Moscou.

    Le pays central de ce corridor est l’Iran. Sauf que les Azéris étaient tellement enivrés par leur victoire qu’ils ont déclaré que le nord ouest de l’Iran appartenait à l’Azerbaïdjan, car c’est un territoire qui possède une population majoritairement Azéris. Autant dire que les Perses n’ont pas du tout apprécié. Et l’Inde dont l’INSTC devait passer par l’Azerbaïdjan, a décidé de changer son tracé et ce sera l’Arménie qui sera choisie. Mais cela reste des projets préliminaires.

    Les Américains ont aussi tout intérêt à exacerber le merdier dans cette région, car cela forcera la Russie à opérer sur deux fronts en même temps. De plus, ce n’est surement pas une coincidence que l’Azerbaïdjan a intensifié son offensive après une visite des représentants arméniens et azéris aux Etats-Unis où ils ont été reçus par Anthony Blinken.

    L’Azerbaïdjan utilise la tactique de la Turquie en jouant sur tous les tableaux. Elle veut le gâteau de l’Eurasie, elle veut se rapprocher de la Turquie et elle ne veut pas se mettre à dos les Occidents. Et les Européens, débiles et impuissants dans l’âme, ne peuvent rien faire que de se mettre à quatre pattes devant Baku qui leur a promis de livrer du gaz pour remplacer celui des Russes. Bon, le volume du gaz russe vers l’Europe est d’environ 200 milliards de cube par an tandis que l’Azerbaïdjan a promis… dans quelques années, de livrer jusqu’à 20 milliards de mètres cube par an ! 10 % du gaz russe suffit-il à fermer les yeux sur la dislocation potentielle de l’Arménie ? Oh que oui ! vous répondrait sans hésiter Von der Leyen avec son petit sourire mignon de Cruella.

    La Turquie joue aussi sa propre carte et elle est antagoniste par rapport à la logique russe, iranienne et syrienne. C’est un secret de polichinelle que la Turquie rêve de reformer l’empire Ottoman en devenant le leader incontesté des pays musulmans dans cette région. L’Iran, la Syrie ou le Pakistan ont des positions beaucoup plus modérées et plus cohérentes avec un monde multipolaire où chacun reste dans son coin et les loups turcs seront bien gardés.

    Mais encore une fois, l’idéologie turque est une raison fantasmagorique pour qu’Erdogan soutienne l’Azerbaïdjan, car c’est de nouveau les routes qui l’intéressent, car la route construit l’avenir. En contrôlant une partie de l’Arménie, la Turquie aura un accès direct à l’Asie Centrale qui est son El Dorado. Le problème de la Turquie est qu’elle est en surchauffe industrielle depuis des années et son modèle économique fait qu’elle doit constamment trouver de nouveaux marchés pour écouler ses produits. Avec une inflation de 70 %, la Turquie utilise la guerre et l’idéologie ottomane pour cacher ses problèmes intérieurs.

    La Russie se trouve prise entre le marteau et l’enclume. L’Arménie fait partie du OTSC (Organisation du Traité de Sécurité Collective) qui est l’équivalent de l’OTAN mené par la Russie. Il y a 2000 “soldats de la paix” russes qui sont déployés au Nagorno-Karabakh et si l’Arménie elle-même est attaquée, alors la Russie devra intervenir sinon cela fera voler en éclat l’OTSC. La sécurité collective a déjà a été activée quand il y a eu des émeutes au Kazakhstan pour tenter de déstabiliser le pouvoir.

    L’Arménie attend la même chose de la Russie si la situation dégénère. La Turquie et l’Azerbaïdjan n’ont pas besoin de conquérir toute l’Arménie. La prise de la province de Syunik dans le sud de l’Arménie leur suffirait, car cela permettra à Ankara d’avoir un accès direct vers l’Azerbaïdjan et l’Asie centrale et vice versa.

    Cette guerre est également la preuve éclatante que les valeurs défendues par l’Occident sont à géométrie variable. Parce que si c’est pour protéger la “démocratie”, les “droits de l’homme”, “l’Etat de droit”, alors l’UE et les Etats-Unis auraient dû aider l’Arménie. Où sont les milliards d’aides aux arméniens, où sont leurs Stingers ou leur HIMARS, où sont les canons César ? Les relations internationales doivent être basés sur le cynisme et le pragmatisme. Selon ces critères, l’Europe n’a pas grand intérêt à aider l’Ukraine comme elle n’en a aucun à aider l’Arménie.

    On pourrait dire que l’Ukraine possède les céréales. Non, l’Europe confisque exprès les céréales ukrainiennes pour affamer les pays pauvres afin de blamer continuellement la Russie. C’est la même chose pour le pétrole et le gaz. Plutôt que d’admettre l’inutilité magistrale de leurs sanctions, les européens préfèrent se les geler et saborder leur industrie plutôt que d’avouer qu’ils ont eu tort sur toute la ligne. Non mais ce qui manque à l’Arménie est que leur dirigeant fasse la tournée des cérémonies des Oscards, donne des interviews à la presse people et balance des discours enflammés en jouant du piano dans la tenue d’Adam. C’est ça qui manque aux arméniens, voyez-vous, ils ne sont pas assez Show Biz et Bankable.

     

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    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

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