Des attaques acoustiques sur les diplomates américains ?
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On a l’impression que c’est un scénario digne d’un roman d’espionnage. Des diplomates américains se plaignent de pertes de l’audition et les rumeurs circulent sur des armes sonores qui en seraient à l’origine. Mais en fait, ce type d’arme n’existe pas et la perte d’audition de ces diplomates a sans doute une cause plus naturelle ou géopolitique.
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On n’aurait pas cru à cette histoire si elle n’avait pas été relayé par The Lancet.1 Des diplomates à Cuba rapportent qu’ils souffrent de perte d’audition et d’un trauma crânien modéré même si les gouvernements de ces diplomates sont aussi perdus que le reste des observateurs. Des rumeurs circulent que ces diplomates ont été visés par une nouvelle arme sonore, mais c’est uniquement de la fiction.
Les médias en parlent depuis le début du mois d’aout, mais c’est le 24 aout qu’Heather Nauert, porte-parole du Département d’Etat, a déclaré que 16 employés du gouvernement américain à Cuba ont souffert des symptômes.2 Le Ministère des Affaires étrangères canadien a également déclaré à la BBC qu’au moins un diplomate canadien avait eu ces symptômes.3 La chaine CBS News a prétendu qu’elle avait mis la main sur le rapport médical d’un des diplomates américains et ce dernier souffrait de symptômes tels que la perte de l’audition, la nausée, la migraine, des problèmes d’équilibre et un trauma crânien modéré. Les médias parlent déjà d’armes sonores, mais The Lancet a demandé à des experts qui travaillent sur le son et l’audition.
Selon Jürgen Altmann, un physicien de l’université de Dortmund, des effets notables sur l’humain nécessite des niveaux sonores extrêmes. Et même si on avait une arme à ultrasons, ce serait difficile qu’elle puisse agir sur de longues distances ou à travers les murs.
Selon Toby Heys de la Manchester Metropolitan University, on a un historique de blessures au cerveau et de perte de l’audition qui remonte à la Première Guerre mondiale, mais les soldats en souffraient parce qu’ils étaient exposés pendant longtemps aux ondes de choc de l’artillerie lourde. Mais les “attaques sonores” sont inaudibles dans cette affaire selon les médias et donc, il est très peu probable que ce soit une arme.
Mais toujours selon Heys, les militaires ont commencé à faire des recherches sur des armes qui émettent des ondes sonores inaudibles par les humains pendant la Seconde Guerre mondiale. Une arme ultrasonique (une fréquence supérieure à l’audition humaine) ou infrasonique (inférieure à l’audition humaine). L’objectif était d’avoir une arme qui ne laisse aucune trace sur les corps. Des appareils infra ou ultrasonique pourraient provoquer des dommages en théorie, mais les probabilités sont très faibles pour une arme infrasonique, car il faudrait un haut-parleur de très grande taille pour produire les décibels à la fréquence désirée. On pourrait diriger les ultrasons sur la tête, mais il faudra les cibler avec une grande précision sinon le son serait dévié ou imprécis. Des volcans ou des séismes peuvent produire des ultrasons, mais tout le monde aurait été impacté et non uniquement les diplomates. Et ces événements seraient massifs et leur impact s’étendrait sur plusieurs kilomètres à la ronde.
Selon Jeffrey Kim, un neuro-otologiste (spécialiste des troubles de l’oreille humaine) au Medstar Georgetown University Hospital, les virus peuvent provoquer des pertes d’audition, mais on a également de l’eau contaminée avec du plomb. Mais comme avec le volcan et le séisme, ces causes auraient dû toucher tout le monde plutôt que simplement des diplomates. Mais une arme sonore est l’hypothèse à écarter dans 99 % des cas, car on ignore tout des circonstances des symptômes de ces diplomates. Vous pouvez avoir 10 personnes qui souffrent des symptômes similaires, mais les causes sont différentes et les médias se sont focalisés sur la corrélation.
Mais dans une perspective géopolitique, on pourrait simplement penser que c’est une affaire montée de toutes pièces afin de justifier un durcissement des relations entre Cuba et les États-Unis. Car jusqu’à preuve du contraire, aucune clinique n’a fait de publications sur ces symptômes. On a juste des médias qui nous disent que les premiers diplomates, touchés, datent de la fin de 2016 “selon des sources proches du dossier” (ce qui ne veut rien et tout dire à la fois). Tant qu’on n’a pas des cas cliniques documentés par des scientifiques et que ces derniers fassent une publication d’étude de cas selon les normes, alors cette affaire ne doit pas être exagérée outre mesure. Notons que des conspirationnistes ont relayé énormément cette affaire sur des sites comme Reddit.4 5 L’hypothèse de la rédaction est que ces diplomates américains et canadiens ont bouffé au même restaurant à Cuba et ils ont chopé une intoxication alimentaire. Et cette hypothèse est aussi valable que celles des médias.
