L’Ibuprofène dans les 3 premiers mois de grossesse impactent la fertilité des futures filles


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  • Les femmes enceintes, qui prennent l’ibuprofène dans les 24 premières semaines de leur grossesse, peuvent réduire la quantité d’ovules dans les ovaires de leurs futures filles. Comme d’habitude, l’étude est limité sur certains points et il faudra éviter les conclusions hâtives.


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    C'est un tissu ovarien qui a été exposé à l'ibuprofène pendant 7 jours. Les grandes cellules marrons sont des cellules germinales qui se meurent et les petites cellules marrons sont également dans le même état de dommage - Crédit : Severine Mazaud-GuiJot, INSERM
    C'est un tissu ovarien qui a été exposé à l'ibuprofène pendant 7 jours. Les grandes cellules marrons sont des cellules germinales qui se meurent et les petites cellules marrons sont également dans le même état de dommage - Crédit : Severine Mazaud-GuiJot, INSERM

    Les chercheurs rapportent la première preuve dans le tissu ovarien humain que l’exposition à l’ibuprofène pendant les 3 premiers mois du développement foetal entraîne une perte non négligeable des cellules germinales qui concernent la fabrication des follicules à partir desquels les ovules se développent. Selon l’étude, les cellules germinales étaient mortes ou n’ont pas réussi à se développer et à se multiplier au rythme habituel.

    Une fertilité réduite pour les futures filles

    Les auteurs de l’étude, publiée dans la revue Human Reproduction, déclarent que leurs résultats soulèvent des inquiétudes quant aux effets à long terme de l’ibuprofène sur la fertilité future des filles exposées à l’ibuprofène.1 Les bébés filles naissent avec un nombre fini de follicules dans leurs ovaires et cela définit leur future capacité de reproduction à l’âge adulte selon la Dre Séverine Mazaud-Guittot, chercheuse à l’INSERM de Rennes en France qui a dirigé l’étude. Une réserve initiale mal stockée se traduira par une durée de vie reproductive raccourcie, une ménopause précoce ou la stérilité.

    Le développement des follicules chez le foetus n’est pas terminé à la fin du premier trimestre, donc si le traitement à l’ibuprofène ne dure pas longtemps, alors nous pouvons espérer à ce que la réserve ovarienne se rétablisse dans une certaine mesure. L’exposition prolongée à l’ibuprofène a considérablement réduit le stock de cellules germinales dans les ovaires foetaux pendant le premier trimestre de la grossesse et les ovaires ne se sont pas complètement remis de ces dommages ce qui suggère que l’exposition prolongée à l’ibuprofène pourrait avoir des effets à long terme sur les femmes. Cette constatation mérite d’être examinée à la lumière des recommandations actuelles concernant la consommation d’ibuprofène par les femmes pendant les premières 24 semaines de grossesse.

    L’utilisation de l’ibuprofène pendant la grossesse

    Environ 30 % des femmes utilisent l’ibuprofène au cours des 3 premiers mois de la grossesse. Les recommandations actuelles sont que l’analgésique ne devrait pas être pris après ce délai, car il est connu pour augmenter les risques de malformations foetales. Cependant, il n’y a pas de directives précises quant à savoir s’il est recommandé de le prendre au cours des premières semaines.

    La Dre Mazaud-Guittot et ses collègues ont obtenu des foetus humains de 7 à 12 semaines de développement à la suite d’interruptions de grossesse légalement provoquées et avec le consentement de la mère. Ensuite, ils ont cultivé le tissu ovarien dans le laboratoire. Une partie du tissu de chaque foetus était exposée à l’ibuprofène et une seconde partie (le contrôle) ne l’était pas. Des échantillons de 185 foetus ont été analysés. De plus, les chercheurs ont mesuré la quantité d’ibuprofène dans le sang du cordon ombilical afin d’analyser le niveau d’exposition du foetus.

    C'est un tissu ovarien qui a été exposé à l'ibuprofène pendant 7 jours. Les grandes cellules marrons sont des cellules germinales qui se meurent et les petites cellules marrons sont également dans le même état de dommage - Crédit : Severine Mazaud-GuiJot, INSERM

    C’est un tissu ovarien qui a été exposé à l’ibuprofène pendant 7 jours. Les grandes cellules marrons sont des cellules germinales qui se meurent et les petites cellules marrons sont également dans le même état de dommage – Crédit : Severine Mazaud-GuiJot, INSERM

    Ils ont constaté que l’ibuprofène traverse la barrière placentaire. La concentration que nous avons trouvée dans les cordons ombilicaux des foetus de mères qui ont ingéré 800 mg (quatre pilules de 200 mg) 2 à 4 heures avant la chirurgie est similaire à la concentration qu’on peut trouver dans le sang de l’adulte pour le même traitement. En d’autres termes, le foetus est exposé à la même concentration que la mère ce qui nous a permis de tester des concentrations proches de celles observées dans le sang des adultes dans les échantillons ovariens du laboratoire selon le Dr Mazaud-Guittot.

    Des dommages sur les cellules germinales

    Contrairement au tissu foetal qui n’a pas été exposé à l’ibuprofène, le tissu qui a été exposé à des concentrations de 10 micromolaires d’ibuprofène pendant une semaine avait environ la moitié du nombre de cellules germinales ovariennes. Nous avons constaté qu’il y avait moins de cellules qui se développaient et se divisaient, plus de cellules qui mouraient et une perte dramatique du nombre de cellules germinales quel que soit l’âge gestationnel du foetus selon la chercheuse. Il y avait des effets significatifs après 7 jours d’exposition à 10 micromolaires d’ibuprofène et nous avons observé la mort cellulaire dès 2 jours après le traitement. Et 5 jours après le retrait de l’ibuprofène, ces effets nocifs de l’ibuprofène n’étaient pas complètement inversés.

    C’est la première étude à examiner les effets de l’ibuprofène sur le tissu ovarien des bébés filles et à montrer que l’ibuprofène peut traverser la barrière placentaire pendant le premier trimestre de la grossesse en exposant le foetus au médicament. Nos résultats suggèrent que, comme avec n’importe quel médicament, l’utilisation de l’ibuprofène devrait être limitée à la plus courte durée et à la dose la plus basse nécessaire pour soulager la douleur ou la fièvre, notamment pendant la grossesse. Les praticiens, les sages-femmes et les obstétriciens sont les mieux placés pour donner des conseils d’expert, car chaque mère et chaque grossesse sont uniques.

    Les limites de l’étude

    Les chercheurs affirment que d’autres travaux doivent être menés sur les mécanismes d’action de l’ibuprofène sur les ovaires humains et sur les analgésiques de remplacement. En outre, l’étude a des limites en ce que le tissu foetal a été étudié en laboratoire plutôt que dans un corps vivant. Une autre limite est la durée. Dans cette étude nous ne pouvons pas traiter l’effet à long terme de ce médicament sur l’ovaire, c’est pourquoi des recherches supplémentaires au niveau de la population sont nécessaires pour déterminer si l’exposition à l’ibuprofène affecte la fertilité ou le fonctionnement reproductif des filles selon la Dre Mazaud-Guittot.

    Le professeur Hans Evers, rédacteur en chef de la revue Human Reproduction, qui n’a pas participé à la recherche, a commenté : Les auteurs méritent d’être félicités pour leurs recherches sur l’effet de l’ibuprofène sur les cellules germinales et les follicules du tissu ovarien humain. Mais à ce stade, il n’est pas possible de déterminer si le nombre réduit de follicules dans les échantillons de tissus des bébés filles pourrait se traduire par une baisse de la fertilité 30 ans plus tard. Des études de suivi sont nécessaires sur les filles de femmes, qui ont pris de l’ibuprofène, pendant leurs trois premiers mois de grossesse.

    Sources

    1.
    Ibuprofen is deleterious for the development of first trimester human fetal ovary ex vivo. Human Reproduction. 10.1093/humrep/dex383″ target=”_blank” rel=”noopener noreferrer”>http://dx.doi.org/10.1093/humrep/dex383. Published February 1, 2018. Accessed February 1, 2018.

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

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