“Post-vérité”, le mot de l’année 2016 sur le dictionnaire Oxford


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  • Chaque année, le dictionnaire Oxford désigne un mot qui caractérise une année. Pour l’année 2016, c’est le mot “post-truth” qu’on connait comme “post-vérité” ou “post-factuelle”. Et c’est une très, très mauvaise nouvelle.


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    Chaque année, le dictionnaire Oxford désigne un mot qui caractérise une année. Pour l'année 2016, c'est le mot "post-truth" qu'on connait comme "post-vérité" ou "post-factuelle". Et c'est une très, très mauvaise nouvelle.

    C’est un changement radical dans l’ère du temps que le vénérable dictionnaire Oxford ait désigné “post-truth” comme le mot de l’année 2016.1 Le terme post-vérité ou post-factuelle désigne des propagandes et des déclarations qui se basent sur l’émotion plutôt que sur la raison. Le terme “post-vérité” a connu sa gloire à 2 reprises en 2016 avec le Brexit et la victoire de Donald Trump. Il montre qu’on peut manipuler les foules si on distille suffisamment de déclarations purement émotionnelles pour cacher la vérité. Le post-truth désigne également le décalage absolu entre la population et les 2 entités de la société qui sont les médias et les politiciens.

    Colin Powell et sa fiole sont le symbole même du "Post-Truth"

    Colin Powell et sa fiole sont le symbole même du “Post-Truth”

    Le terme “post-vérité” désigne également notre tendance à pardonner aux politiciens alors qu’ils mentent comme des arracheurs de dents. Le Post-Truth est une hérésie en science et la communauté scientifique doit s’en inquiéter. Cela sous-entend que la vérité est obsolète comme quelque chose qui fait partie du passé. L’image la plus célèbre du Post-Truth est Colin Powell lorsqu’il brandissait sa fiole aux Nations Unies pour prétendre que l’Irak fabrique des armes de destructions massives. Mais comment le post-truth est-il devenu la nouvelle vérité ?

    Il y a plusieurs raisons et le relativisme est sans doute l’un de ses piliers les plus importants. Le relativisme peut être important en philosophie, mais il n’a aucun intérêt en science. Le relativiste consiste à dire que toutes les vérités se valent. J’admets que le réchauffement climatique existe ! J’estime que le réchauffement climatique n’existe pas parce que j’ai ce que j’ai envie de croire. Pour les partisans de la Post-vérité, ces 2 phrases se valent alors que l’échelle de vérité est totalement différente. Le fait que vous ne croyez pas au réchauffement climatique ne va pas le faire disparaitre par magie. La même chose est valable pour les vaccins. Donald Trump et Brexit ne sont pas coupables. Ils ont juste compris comment exploiter la post-factuelle pour leurs intérêts. Les vrais coupables sont les politiciens depuis toutes ces années qui continuent de considérer des croyances comme des preuves scientifiques pour ne pas choquer leur électorat. On justifie souvent le post-truth en invoquant Nietzsche. On a coutume de dire que pour Nietzsche, il n’y a pas de vérité absolue et qu’on peut utiliser le relativisme dans certains cas. Nous ne sommes pas des experts de Nietzsche, mais ce serait étonnant qu’on puisse lui donner cette interprétation. Pour Nietzsche, la tromperie est parfois nécessaire, car c’est un outil qui permet de supprimer ce cliché que tout est blanc ou noir.

    Nietzsche encourageait à considérer le monde comme étant très nuancé et il était surtout contre les jugements moraux qui amènent des certitudes que tu es le méchant et je suis le gentil. Il niait le concept de faits moraux en arguant qu’il y avait uniquement des interprétations morales et qu’on ne peut pas considérer ces dernières comme étant vraies. Nietzsche considérait l’honnêteté intellectuelle comme une valeur suprême. Quand il disait qu’il était contre la vérité, il ciblait surtout les suppositions et les déclarations qu’on faisait croire à la vérité. Le meilleur exemple est quand les leaders religieux ont le droit de mentir tout en distillant leurs vérités sans qu’on se pose des questions.

    Mais revenons des pays philosophiques et considérons les autres piliers du post-truth de 2016. On a les réseaux sociaux et les bulles du filtrage de l’information. On va aller naturellement vers des informations qui nous confortent même si elles sont fausses. Et les messageries amplifient énormément ce phénomène puisque ce sont des applications qui sont des boites fermées avec très peu d’interaction avec le reste du monde. Remarquez comme une messagerie comme Facebook Messenger fait tout pour que les utilisateurs ne quittent jamais son application avec le risque de bulles de plus en plus dangereuses. Les algorithmes de Facebook et de Google, à force de cibler les profils publicitaires, sont devenus des bulles gigantesques. Mais il faut distinguer 2 types de bulles d’information. Tout le monde va créer naturellement sa bulle d’information et c’est normal. Même si l’esprit critique nous dit de nous confronter avec des opinions contradictoires, on ne va pas nier que c’est désagréable et qu’on a tendance à l’éviter.

    Cependant, ce type de bulle est transparent et avec un peu d’effort, les personnes peuvent quand même recouper l’information pour détruire les croyances qui circulent dans la bulle. Mais une autre bulle est apparue depuis 2015 et c’est la bulle totalement opaque. C’est pourquoi nous mettons en garde sur l’utilisation exclusive des messageries pour nous informer. Car les messageries ne sont pas affectées par des algorithmes, mais leur bulle est totalement opaque. Étant donné qu’on reçoit uniquement des informations provenant de nos amis et de nos proches, le risque de manipulation est extrême. Le pouvoir des messageries est très sous-estimé. WhatsApp est utilisé par un milliard d’utilisateurs dans le monde et cela continue d’augmenter. Mais ce n’est pas juste une application de plus. C’est un changement de tendance qui fait que les gens quittent progressivement la sphère publique de Facebook pour aller se cantonner et “murmurer des choses” en des cercles très fermés. Cela encourage une propagation foudroyante de rumeurs et de fausses informations.

    Quoi qu’il en soit, le post-vérité va augmenter dans le futur, car aucun acteur de la technologie ou de la sphère médiatique ne semble prendre conscience de l’ampleur du problème. La communauté scientifique et les consensus scientifiques en général vont prendre de sacrés coups dans les mois à venir montrant que le post-truth est devenu finalement le Only-Acceptable-Truth.

    Sources

    1.
    Word of the Year 2016 is… | Oxford Dictionaries. Oxford Dictionaries | English. https://en.oxforddictionaries.com/word-of-the-year/word-of-the-year-2016. Accessed November 29, 2016.

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

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