Alzheimer : La réaction en chaîne des cellules du cerveau


  • FrançaisFrançais

  • Dans la première étude du genre, les chercheurs montrent comment une cascade d’événements dans les cellules du cerveau peut provoquer la maladie d’Alzheimer et comment cette découverte offre des pistes pour stopper et traiter cette réaction en chaine.


    Suivez-nous sur notre page Facebook et notre canal Telegram

    Les neurones, traités avec des protéines associées à l'Alzheimer, montrent une augmentation drastique de calcium (bleu, vert, jaune et rouge au blanc) et les cellules forment des structures en forme de perles remplies avec des tau (les flèches) identiques aux neurones chez les patients atteints d'Alzheimer - Crédit : Cohen Lab, UNC School of Medicine
    Les neurones, traités avec des protéines associées à l'Alzheimer, montrent une augmentation drastique de calcium (bleu, vert, jaune et rouge au blanc) et les cellules forment des structures en forme de perles remplies avec des tau (les flèches) identiques aux neurones chez les patients atteints d'Alzheimer - Crédit : Cohen Lab, UNC School of Medicine

    Dans le cerveau des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, il existe des dépôts anormaux de protéines bêta amyloïdes et de protéines tau et des colonies de cellules immunitaires actives. Mais les scientifiques ignorent précisément comment ces trois facteurs majeurs se combinent pour provoquer la maladie. Désormais, les chercheurs de l’École de médecine de l’UNC et des instituts nationaux de la santé ont utilisé des expériences de laboratoire pour révéler pourquoi un médicament d’Alzheimer en développement est prometteur et comment d’autres thérapies pourraient inverser le processus de la maladie.

    Des réactions en chaine

    Dirigés par Todd Cohen, professeur adjoint de neurologie, les scientifiques de l’UNC ont utilisé des cultures de cellules humaines pour montrer comment la bêta amyloïde peut déclencher une réponse inflammatoire dramatique dans les cellules immunitaires et comment cette interaction endommage les neurones. Ensuite, ils ont montré que ce type de lésion des neurones provoque la formation de structures ressemblant à des perles qui sont remplies par des protéines tau anormales. On sait que des structures semblables à des perles se forment dans les cellules du cerveau de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

    Les chercheurs de l’UNC ont également identifié deux protéines, MMP-9 et HDAC6, qui aident à promouvoir cette cascade d’effets nocifs allant de l’amyloïde jusqu’à l’inflammation de la protéine tau. Ces protéines et d’autres pourraient devenir des médicaments potentiels pour traiter ou prévenir la maladie d’Alzheimer.

    Il est intéressant que nous ayons pu observer tau, la principale protéine d’Alzheimer, à l’intérieur de ces structures en perles selon Cohen. Nous pensons que la prévention de la formation de ces structures permettrait aux gens d’avoir des neurones plus sains qui sont plus résistants à la maladie d’Alzheimer.

    Les résultats ont été publiés dans la revue Cell Reports. Pour commencer l’étude, Cohen et ses collègues ont exposé des cellules immunitaires dans un état inflammatoire dans un cerveau d’Alzheimer à de minuscules amas de bêta amyloïdes ou oligomères qui sont considérés comme les formes les plus nuisibles de la protéine.

    Notre hypothèse était que les oligomères bêta-amyloïdes activeraient une réponse inflammatoire dans ces cellules immunitaires comme l’ont suggéré des recherches antérieures et nous voulions déterminer si cela induirait des formes pathologiques de tau lorsqu’ils seraient administrés aux neurones selon Cohen. Les chercheurs se sont ensuite concentrés sur le fluide dans lequel les cellules immunitaires avaient augmenté. Ce fluide, rempli de facteurs inflammatoires (les protéines), ressemblait au fluide dans lequel ces cellules vivaient habituellement à l’intérieur des cerveaux humains. L’équipe de Cohen a ajouté ce fluide aux cultures des neurones corticaux humains. Les neurones ont rapidement développé des gonflements anormaux et semblables à des perles le long de leurs axones et de leurs dendrites.

    Ce perlage neuritique sur les axones et les dendrites a été observé chez les patients souffrant de la maladie d’Alzheimer et il a été considéré comme un signe précoce de lésions neuronales même si on ignore comment le perlage est associé à une tau anormale ou si le perlage mène à la maladie d’Alzheimer.

    L’équipe de Cohen a ensuite cherché du tau dans les perles et elle en a trouvé une accumulation frappante. Mais cette accumulation avait une forme anormale et indétectable avec les outils habituels utilisés par les scientifiques pour détecter le type de tau généralement observé chez les patients atteints d’Alzheimer. À la place, le tau perlé a été modifié d’une manière différente. Selon Cohen, c’est cette modification qui provoque l’agrégation de tau.

    Les protéines Tau fournissent normalement un support structurel pour de longues structures, similaires à un chemin de fer, appelées microtubules. Les microtubules sont utilisés pour transporter des molécules essentielles le long des axones. Pour des raisons qu’on ignore, les protéines de tau dans les neurones, affectés par la maladie d’Alzheimer, possèdent un schéma différent. Elles sont détachées des microtubules et elles ont des modifications chimiques anormales. Ces protéines s’agglutinent en forme de fils enchevêtrés. On ignore si ces agrégats de tau nuisent activement aux neurones, mais des études antérieures ont suggéré que la perte de tau provoquée par les microtubules et la perturbation résultante du transport axonal pourrait provoquer de graves dommages.

    L’importance des structures en perle

    La découverte de tau anormal dans les perles de neurites indiquait que ces perles pourraient marquer l’entrée de tau dans le processus de la maladie d’Alzheimer. Au sein des perles, le laboratoire de Cohen a également trouvé des niveaux élevés de calcium qui sont connus pour nuire aux neurones et qui sont considérés comme une caractéristique importante des neurones chez les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

    Les neurones, traités avec des protéines associées à l'Alzheimer, montrent une augmentation drastique de calcium (bleu, vert, jaune et rouge au blanc) et les cellules forment des structures en forme de perles remplies avec des tau (les flèches) identiques aux neurones chez les patients atteints d'Alzheimer - Crédit : Cohen Lab, UNC School of Medicine

    Les neurones, traités avec des protéines associées à l’Alzheimer, montrent une augmentation drastique de calcium (bleu, vert, jaune et rouge au blanc) et les cellules forment des structures en forme de perles remplies avec des tau (les flèches) identiques aux neurones chez les patients atteints d’Alzheimer – Crédit : Cohen Lab, UNC School of Medicine

    Nous pensons que ces facteurs neuroinflammatoires déclenchent cette cascade selon Cohen. Ils inondent le neurone avec du calcium. Et nous pensons qu’une fois que le calcium s’accumule, il provoque une modification anormale de tau. Cela provoque un effet de boule de neige. Le tau se détache des microtubules et il est dispatché dans tout le neurone en formant ces perles. Une possibilité est que ces perles remplies de tau sont les sites où les agrégats classiques de tau finiront par apparaître ce qui est la marque de la maladie d’Alzheimer.

    Une équipe dirigée par le chercheur collaborateur Xian Chen, professeur agrégé de biochimie et de biophysique à UNC, a utilisé la spectrométrie de masse pour trier les molécules neuroinflammatoires induites par les bêta amyloïdes qui ont déclenché l’afflux de calcium et les perles de neurites. L’équipe a pu montrer qu’une protéine en particulier, MMP-9, était responsable de certains de ces effets néfastes.

    La MMP-9 est une protéine inflammatoire qui est élevée dans le cerveau des patients atteints d’Alzheimer selon Cohen. Dans notre étude, nous montrons que le MMP-9 peut déclencher un afflux de calcium qui inonde le neurone. Les chercheurs ont également identifié la protéine HDAC6, qui provient des neurones et qui se concentre dans les perles de neurites. Normalement, l’HDAC6 est censé détecter les agrégats de protéines indésirables dans les neurones pour les transporter afin de les éliminer. Cependant, le blocage du HDAC6 a empêché la formation de la quasi-totalité des perles dans les expériences de laboratoire de Cohen.

    2 protéines prometteuses pour des traitements

    Ces deux protéines sont élevées dans les zones touchées du cerveau d’Alzheimer. Les entreprises pharmaceutiques développent et testent actuellement des inhibiteurs de HDAC6 qui connaissent une réussite intéressante dans les études préliminaires même si on ignore précisément le fonctionnement de ces inhibiteurs.

    Nos travaux pourraient expliquer pourquoi les inhibiteurs HDAC6 ont du potentiel selon Cohen. Et nous pensons que notre étude peut aider à informer le développement d’autres types d’inhibiteurs qui affectent cette cascade, notamment ceux qui pourraient avoir un impact sur les processus cognitifs.

    Une stratégie thérapeutique pour bloquer HDAC6 et MMP-9 pourrait avoir des applications au-delà de la maladie d’Alzheimer. Le perlage neuritique est observé dans plusieurs autres maladies neurodégénératives et on le voit également après une blessure à la tête. Les scientifiques ont même observé de faibles étendues de perles dans des cerveaux âgés qui semblent en bonne santé. Le perlage pourrait être un mécanisme général sous-jacent au déclin cognitif selon Cohen.

    Dans leur étude, Cohen et ses collègues ont trouvé des perles de neurites remplies de tau dans le cerveau de souris âgées. Et ils ont découvert que la neuroinflammation chronique pourrait inciter les perles à se former chez des souris plus jeunes. Les chercheurs se concentrent désormais sur la création d’un modèle de souris pour confirmer et étudier davantage le processus de l’amyloïde jusqu’à l’inflammation de tau vu qu’ils ont observé dans leur étude.

    Si nous pouvons démontrer cette cascade dans une souris de souche sauvage, alors nous pourrons étudier la maladie d’Alzheimer et tester les traitements chez les souris normales de laboratoire sans avoir besoin du génie génétique qu’on utilise dans les modèles de souris Alzheimer actuels selon Cohen.

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

    Pour me contacter personnellement :

    Laisser un commentaire

    Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *