L’invasion de crapauds toxiques à Madagascar menace les prédateurs locaux


  • FrançaisFrançais

  • Une étude suggère que l’introduction des crapauds toxiques invasifs originaires d’Asie menace de nombreux prédateurs locaux de la Grande Île en accentuant une pression supplémentaire sur la biodiversité.


    Suivez-nous sur notre page Facebook et notre canal Telegram

    Le Duttaphrynus melanostictus, un crapaud toxique qui menace la faune de Madagascar - Crédit : Benjamin Marshall
    Le Duttaphrynus melanostictus, un crapaud toxique qui menace la faune de Madagascar - Crédit : Benjamin Marshall

    L’introduction récente du crapaud commun asiatique à Madagascar a fait craindre que cet amphibien toxique puisse faire des ravages sur la faune déjà gravement menacée de l’île. Désormais, les chercheurs rapportent des preuves génétiques dans la revue Current Biology montrant que ces craintes sont bien fondées. Quasiment tous les prédateurs originaires de Madagascar sont très sensibles aux toxines des crapauds. S’ils mangent les crapauds, alors ce serait mortel pour eux dans la plupart des cas.1

    Des crapauds réputés pour leur toxicité

    En Australie, l’introduction de ces crapauds a profondément perturbé de nombreux écosystèmes en éliminant les principaux prédateurs des réseaux trophiques locaux avec leurs toxines selon Wolfgang Wüster de l’Université de Bangor, au Royaume-Uni. Des effets similaires sont susceptibles de se produire à Madagascar, où les crapauds n’étaient jamais présents auparavant, les prédateurs, qui se nourrissent souvent de crapauds et n’apprennent pas ou n’évoluent pas rapidement pour les éviter, risquent de disparaitre ou de souffrir d’une réduction drastique de leur population.

    Le Duttaphrynus melanostictus, un crapaud toxique qui menace la faune de Madagascar - Crédit : Wolfgang Wüster

    Le Duttaphrynus melanostictus, un crapaud toxique qui menace la faune de Madagascar – Crédit : Wolfgang Wüster

    Les crapauds bufonidés sécrètent des bufadienolides qui tuent de nombreuses espèces de prédateurs en inhibant la pompe sodium-potassium (Na+/K+-ATPase) qui est un composant essentiel des membranes cellulaires animales. Mais on sait que certaines espèces ont développé une résistance à ces toxines par des mutations ponctuelles répétées, prévisibles et spécifiques dans le gène codant pour cette enzyme essentielle. En tant que telle, l’arrivée des crapauds asiatiques toxiques et envahissants (Duttaphrynus melanostictus) à Madagascar a suscité de vifs débats sur leur impact probable et les mesures qui devraient être prises pour les contrôler ou les éradiquer.

    La plupart des prédateurs à Madagascar sont vulnérables à la toxine du crapaud

    Les prédateurs à Madagascar sont vraiment sensibles aux toxines des crapauds. Cela a été largement rapporté par les défenseurs de l’environnement, mais sans preuve concrète selon le co-auteur Andolalao Rakotoarison, coprésident du Groupe de spécialistes amphibiens de l’UICN à Madagascar. Pour combler cette lacune dans la nouvelle étude, les chercheurs ont analysé les séquences du gène Na+/K+-ATPase de 77 espèces malgaches se nourrissant potentiellement de crapauds dont 27 serpents, 2 lézards, 12 grenouilles, 8 mammifères et 28 oiseaux. Leurs études ont montré qu’une seule espèce indigène, un rongeur connu sous le nom d’antsangie à queue blanche (Brachytarsomys albicauda), présentait des signes de résistance à la nouvelle toxine.

    Le Duttaphrynus melanostictus, un crapaud toxique qui menace la faune de Madagascar - Crédit : Franco Andreone

    Le Duttaphrynus melanostictus, un crapaud toxique qui menace la faune de Madagascar – Crédit : Franco Andreone

    Les résultats suggèrent fortement que les crapauds invasifs sont susceptibles d’avoir des impacts significatifs sur la faune malgache et ils soulignent l’importance de contrôler la propagation de cette espèce exotique pour prévenir une aggravation de la crise de la biodiversité selon les chercheurs. Nos résultats confirment que les crapauds envahissants auront probablement un impact significatif sur de nombreuses espèces endémiques malgaches en s’ajoutant aux problèmes de conservation actuels du pays et mettant potentiellement en danger de nombreuses espèces endémiques les plus emblématiques de Madagascar comme les tenrecs et le fossa ainsi qu’une pléthore d’autres espèces selon le co-auteur Nicholas Casewell de la Liverpool School of Tropical Medicine.

    Une menace potentielle par les têtards des crapauds

    Le co-auteur Frank Glaw, spécialiste des amphibiens malgaches de la Collection de zoologie de l’État bavarois, a noté que les têtards du crapaud pourraient également menacer les poissons endémiques ainsi que les prédateurs invertébrés, notamment les coléoptères, les larves de libellules et les crustacés. Une étude similaire est donc nécessaire pour évaluer la vulnérabilité des prédateurs aquatiques malgaches.

    C’est un autre exemple de la manière dont les espèces introduites d’une partie du monde à l’autre peuvent perturber les écosystèmes naturels selon Ben Marshall, étudiant à la maîtrise à l’Université de Bangor et premier auteur de la nouvelle étude. La prévention de l’introduction d’espèces exotiques envahissantes doit être une priorité absolue pour la conservation de la biodiversité.

    Sources

    1.
    Widespread vulnerability of Malagasy predators to the toxins of an introduced toad. Current Biology. 10.1016/j.cub.2018.04.024″ target=”_blank” rel=”noopener noreferrer”>http://dx.doi.org/10.1016/j.cub.2018.04.024. Published June 4, 2018. Accessed June 4, 2018.

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

    Pour me contacter personnellement :

    Laisser un commentaire

    Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *