La couleur du progrès – Le Déclin


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  • Extrait de la nouvelle “La couleur du progrès” de mon livre “Le Déclin“.


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    Extrait de la nouvelle "La couleur du progrès" de mon livre "Le Déclin".

    La vieille continua son aventure et elle déboucha sur le quartier que tout le monde évitait comme la peste lépreuse. Le Quartier du Croissant semblait normal en apparence. Comme si une nuit de pleine lune, vous aviez perdu votre chemin et des occupants d’une maison vous donnait le gîte pour vous apercevoir que ce sont des vampires.

    Ici, la langue était différente, les mœurs étaient autres et la normalité était bannie à jamais. A chaque entrée du quartier, la pancarte « Zone Charia » trônait comme un avertissement pour les impies. Des blancs, des noirs, des jaunes vaquaient à leurs occupations dans le quartier du croissant.

    Le voile intégral était la seule partie féminine visible et la barbe jusqu’au ventre et au-delà tentait de prouver une virilité peu commune et pourtant si banale. Ici, la radicalité est hors de toute raison. La langue orale et écrite, provenait de pays lointains, trop méconnus pour inspirer la confiance et trop différents pour la créer.

    La langue était trop barbare pour la comprendre et trop sanctifiée pour la comprendre. En ces lieux, Voltaire avait fait ses valises depuis belle lurette pour des cieux plus cléments. La vieille fut scrutée d’un mauvais œil, par des corbeaux blancs et noirs. Des yeux noirs et tranchants comme une lame de bourreau.

    « Comment osait-elle venir ici ? », « Ne connaît-elle pas les règles ? ». La vieille portait une jupe jusqu’à ses pieds et une veste à manches longues, un petit foulard couvrait sa gorge. Mais ce n’était pas assez pour le Croissant. Il voulait jouer à cache-cache avec le désir et la pudeur, malsaine à souhait, était érigée en reine. Mais on la laissa passer.

    « Elle doit être gâteuse » entendit-elle. La voix semblait provenir d’une caverne. Une voilée entièrement noire, comme la nuit la plus malhonnête, la regardait en proférant des paroles ressemblant à des sortilèges. Malgré un revêtement digne du GIGN, la voilée avait des pieds dans des sandales, laissant voir une peau blanche comme la crème, comme celle de la créature que la vieille avait rencontré à la sortie de l’appartement.

    Les appels à la prière résonnaient dans tout le quartier. Chacun sa mosquée et chacun sa route vers des Mecques aussi différentes que l’arc-en-ciel. Les femmes étaient enfermées dans la vertu de l’ignorance et les hommes ne pouvaient pas sortir de leurs guerres intérieures dont certaines gouttes transpiraient à l’extérieur.

    La vieille se souvenait de l’histoire du Quartier du Croissant. Très récent, ce quartier était parti d’une rixe de mauvais goût dans une piscine. Par la canicule extrême, une piscine publique avait ouvert ses portes dans son quartier gris.

    Des femmes voilées s’étaient manifestés pour se baigner, mais elles voulaient des heures régulières exclusives. Aucun homme pendant l’horaire prévu comme une interdiction funeste pour des regards lascifs et suspicieux. Les autorités, affamées par l’urne cadavérique, acquiescèrent. La piscine fut fermée au grand public, manant et laïque, à certaines heures.

    Ensuite, les croissantois se plaignirent que le vestiaire avait des vitres, donnant sur la roue, permettant aux manants de voir leur nudité dont la sensualité était loin d’être suffisante pour créer une érection même pour un adolescent prépubère. Les vitres étaient sans teint, mais les autorités acquiescèrent. L’urne cadavérique était trop précieuse et elle devait être remplie coûte que coûte.

    Ensuite, les croissantois se plaignirent qu’il y ait des hommes non croissantois dans la piscine. Les hommes perdirent leurs emplois. Ensuite, la plainte s’éleva que les femmes manants les agressaient avec leur nudité. Les femmes, voulant préserver leur pitance, revêtirent des voiles.

    Les douches furent purifiées à intervalles réguliers par un croissantois plus grand et plus respecté que les autres. Et à la fin, les croissantois demandèrent que seuls les croissantois gèrent la piscine pendant l’horaire prévu. Les autorités n’acquiescèrent pas. Une partie de la piscine était financée par le quartier blanc qui voyait cette invasion d’un très mauvais œil.

    Les croissantois se rebellèrent, criant à la colonisation, à l’esclavagisme des minorités trop visibles aux yeux de tous. Une guerre éclata, des morts s’ensuivirent et paniquées par l’urne cadavérique vide, les autorités leur donnèrent un quartier dédié où la radicalité pouvait pousser comme du sumac vénéneux qui envahit petit à petit toute la forêt enchantée des manants.

    Le quartier se développa, attirant des rebuts et des marginaux de tous horizons. La vieille regarda la boutique, du licite pour des trucs insipides à souhait. Une sorte de déluge d’autorisation tacite pour que les gens civilisés quittent ce quartier à jamais.

    Une véritable frénésie se ressentait dans ce quartier. La frustration sexuelle, morale et physique bouillonnait comme l’eau dans une marmite trop pleine. La tension était palpable comme un fumeur qui tente de quitter les émanations délicieuses de la nicotine qui venaient se nicher dans ses neurones et qui l’apaisaient, une oasis enchanteresse dans un monde aussi sec que le Sahara et aussi rocailleux que les mines du Sahel.

    La vieille hâta son pas. Ici, un couteau vient rapidement rencontrer votre gorge. Un mot de travers et c’est fini. Des jeunes s’étaient attroupés, la laissant passer, non sans un crachat de mépris envers les manants qui avaient donné leur terre et qui étaient remerciés par un flot d’immondices, sortant indéfiniment de leurs cavités buccales.

    La vieille arriva dans le quartier vert. Paisible, des jardins fleuris, des parcs à perte de vue, pas un bruit de pollution, mais la folie qui y règne est bien pire que dans le quartier du Croissant. Ici, les voitures, les motos, les vélos et les skates étaient interdits. Tout le monde devait marcher à pied jusqu’aux quartiers voisins pour prendre le bus et le métro.

    Des extraits de la nouvelle « La couleur du progrès » de mon livre « Le déclin », disponible sur Amazon

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

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