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Théorie de l’information pour lutter contre la résistance aux traitements

L’un des enjeux majeurs des thérapies modernes contre le cancer est la réponse adaptative des cellules cancéreuses aux thérapies ciblées : dans un premier temps, ces thérapies sont très souvent efficaces, puis des résistances adaptatives apparaissent, permettant aux cellules tumorales de proliférer à nouveau. Bien que cette réponse adaptative soit théoriquement réversible, une telle inversion est entravée par de nombreux mécanismes moléculaires qui permettent aux cellules cancéreuses de s’adapter au traitement. L’analyse de ces mécanismes est limitée par la complexité des relations de cause à effet extrêmement difficiles à observer in vivo dans des échantillons tumoraux. Afin de relever ce défi, une équipe de l’Université de Genève (UNIGE) et des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), Suisse, a utilisé pour la première fois la théorie de l’information, afin d’objectiver in vivo les régulations moléculaires en jeu dans les mécanismes de la réponse adaptative et leur modulation par une association thérapeutique. Ces résultats sont publiés dans la revue Néoplasie.

La réponse adaptative limite l’efficacité des thérapies ciblées utilisées pour lutter contre le développement des tumeurs : après une phase de traitement efficace qui réduit la taille de la tumeur, il se produit une adaptation à la molécule utilisée qui permet aux cellules tumorales de proliférer à nouveau. “Nous savons maintenant que cette résistance aux traitements a une large composante réversible qui n’implique pas de mutations, qui sont un processus irréversible”, explique Rastine Merat, chercheur au Département de pathologie et immunologie de la Faculté de médecine de l’UNIGE, responsable du l’unité d’onco-dermatologie des HUG et l’investigateur principal de l’étude.

La recherche confrontée à la complexité des régulations biologiques

Afin de prévenir la résistance aux thérapies ciblées, les scientifiques doivent comprendre les mécanismes moléculaires de la réponse adaptative. “Ces mécanismes peuvent impliquer des variations dans l’expression des gènes, par exemple”, explique Rastine Merat. Il faut alors modifier ou prévenir ces variations au moyen d’une association thérapeutique qui en bloque les conséquences voire les prévient. Un défi demeure : la description de ces mécanismes et leur modulation sous l’effet d’une association thérapeutique est très souvent réalisée sur des cellules isolées en culture et non validées dans le tissu tumoral de l’organisme. “Cela tient essentiellement à la difficulté d’objectiver ces mécanismes, qui peuvent survenir de manière transitoire et seulement dans une minorité de cellules des tissus tumoraux, et surtout qui impliquent des relations de cause à effet non linéaires”, explique le chercheur genevois.

Application de la théorie de l’information aux tumeurs

Pour contrer ces difficultés, l’équipe de l’UNIGE et des HUG a eu l’idée d’utiliser la théorie de l’information, plus précisément en quantifiant l’information mutuelle. Cette approche a déjà été utilisée en biologie, principalement pour quantifier la signalisation cellulaire et comprendre les réseaux de régulation génétique. « Cette méthode statistique permet de lier deux paramètres impliqués dans un mécanisme en mesurant la diminution de l’incertitude de l’un des paramètres lorsque la valeur de l’autre paramètre est connue », simplifie Rastine Merat.

Pratiquement, les scientifiques procèdent étape par étape : ils réalisent des biopsies de tumeurs (en l’occurrence des mélanomes) dans un modèle murin à différents stades de leur développement au cours de la thérapie. A l’aide d’analyses immunohistochimiques, c’est-à-dire de coupes tumorales, ils mesurent, par une approche automatisée, l’expression de protéines impliquées dans le mécanisme mis en jeu dans la réponse adaptative. “L’approche mathématique proposée est facilement applicable aux techniques de routine telles que l’immunohistochimie et permet de valider in vivo la pertinence des mécanismes étudiés, même s’ils surviennent dans une minorité de cellules et de manière transitoire”, explique le chercheur genevois. . Ainsi, les scientifiques peuvent non seulement valider dans l’organisme les mécanismes moléculaires qu’ils étudient, mais également l’impact de combinaisons thérapeutiques innovantes qui résultent de la compréhension de ces mécanismes. “De même, nous pourrions utiliser cette approche dans des essais thérapeutiques comme marqueur prédictif de la réponse aux combinaisons thérapeutiques qui cherchent à prévenir la résistance adaptative”, poursuit-il.

Une méthode adaptée à tous les types de cancer

“Cette méthode, développée dans un modèle de mélanome, pourrait être appliquée à d’autres types de cancers pour lesquels les mêmes enjeux de résistance adaptative aux thérapies ciblées se posent et pour lesquels des approches de thérapies combinées basées sur la compréhension des mécanismes impliqués sont en cours de développement”, conclut Rastine Mérat.

Source de l’histoire :

Matériaux fourni par Université de Genève. Remarque : Le contenu peut être modifié pour le style et la longueur.

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