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Découverte d’une nouvelle espèce d’orang-outan (Pongo tapanuliensis)

Un orang-outan de l'espèce Pongo tapanuliensis - Crédit : Andrew Walmsley

Un orang-outan de l'espèce Pongo tapanuliensis - Crédit : Andrew Walmsley

Les scientifiques reconnaissent 6 espèces vivantes de grands singes en dehors des humains qui sont les orangs-outans de Sumatra et de Bornéo, les gorilles de l’Est et de l’Ouest, les chimpanzés et les bonobos. Mais les chercheurs, dans un papier dans Current Biology, estiment qu’il y a désormais 7 espèces de grands singes sur la base d’une série de preuves montrant qu’une population isolée d’orangs-outans vivant à Sumatra est en fait sa propre espèce unique. Ils ont nommé la nouvelle espèce l’orang-outan Tapanuli (Pongo tapanuliensis).1

Malheureusement, selon les chercheurs, il ne reste plus que 800 orangs-outans de Tapanuli. Les individus existants sont menacés par la perte de l’habitat et la chasse. À peine découverte, cette espèce de grand signe est déjà l’un des plus menacés de la planète. C’est rare qu’on découvre un grand singe et la découverte est très excitante selon Michael Krutzen de l’Université de Zurich en Suisse, auteur principal de l’étude.

Les grands singes comptent parmi les espèces les mieux étudiées au monde selon Erik Meijaard de l’Australian National University. Et si après 200 ans de recherche biologique, nous pouvons encore trouver de nouvelles espèces dans ce groupe, alors cela soulève des questions sur les espèces cachées, les relations écologiques inconnues et les limites que nous ne devrions pas franchir. Nous menons une vaste expérience mondiale, mais nous avons une compréhension quasi inexistante de ce que cela implique sur notre propre survie.

Un crâne d’orang-outan de l’espèce Pongo tapanuliensis – Crédit : Nater et al.

La nouvelle espèce d’orang-outan vit dans la région de Batang Toru au nord de Sumatra en Indonésie. On avait des rumeurs, mais on ignorait que cette population d’orangs-outans existait jusqu’en 1997. Ils vivent au sud de ce qui était l’aire de répartition connue des orangs-outans de Sumatra. Des études antérieures ont suggéré que le groupe différait des autres orangs-outans sur le plan comportemental et au niveau génétique, mais on ignorait si ces différences étaient suffisantes pour justifier sa désignation en tant que nouvelle espèce. La découverte a eu lieu en 2013, quand l’équipe de recherche a eu accès à un squelette appartenant à un orang-outan de Batang Toru tué dans un conflit homme-animal. Des études minutieuses de l’animal ont révélé des différences constantes dans son crâne et ses dents.

Une analyse sophistiquée de 37 génomes d’orangs-outans montre que la plus profonde division de l’histoire évolutive des orangs-outans vivants remonte à plus de 3 millions d’années entre la population de Batang Toru et les orangs-outans de Bornéo au nord du lac Toba. Les orangs-outans de Bornéo et de Sumatra ne se séparèrent que beaucoup plus tard, il y a moins de 700 000 ans. Les preuves comportementales et écologiques apportent un soutien supplémentaire à la notion que les orangs-outans vivant à Batang Toru sont une espèce distincte selon les chercheurs.

Un orang-outan de l’espèce Pongo tapanuliensis – Crédit : Maxime Aliaga

Les orangs-outans de Batang Toru semblent être les descendants directs des premiers orangs-outans qui avaient migré de l’Asie continentale et ils constituent ainsi la plus ancienne lignée évolutive du genre Pongo selon Alexander Nater de l’Université de Zurich. La population de Batang Toru était liée aux populations du nord jusqu’à il y a 10 000 ou 20 000 ans pour s’isoler par la suite.

Les résultats signifient qu’il faut soustraire 800 individus des orangs-outans de Sumatra. Et les orangs-outangs de Tapanuli sont également gravement menacés par la chasse et le développement proposé d’un barrage hydroélectrique qui inonderait de grandes parties de leur meilleur habitat. C’est particulièrement décourageant quand on sait que des analyses précédentes suggèrent qu’un taux de mortalité de moins de 1 pour cent par an suffirait à faire disparaître les orangs-outangs de Tapanuli.

Si 8 individus sur 800 sont tués par an, alors l’espèce pourrait être condamnée selon les scientifiques. Les chercheurs estiment que la chose la plus importante est de travailler avec les organisations dans la région et les autorités gouvernementales indonésiennes pour demander un soutien pour des mesures de conservation plus efficaces pour protéger la région de Batang Toru. Ils veulent également en savoir plus sur la relation de l’orang-outang Tapanuli avec les populations d’orangs-outans disparues qui vivaient dans d’autres parties de Sumatra.

Sources

1.
Morphometric, Behavioral, and Genomic Evidence for a New Orangutan Species. Current Biology. http://dx.doi.org/10.1016/j.cub.2017.09.047.
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