Juul et amende record : Comment la vape est prise pour une vache à lait


  • FrançaisFrançais

  • L’amende colossale de Juul, dépassant 400 millions de dollars, pour “avoir promu la vape chez les jeunes” est une énième tentative pour les Etats américains de considérer la cigarette électronique comme une vache à lait comme il l’ont fait avec le tabac et le MSA.


    Suivez-nous sur notre page Facebook et notre canal Telegram

    L'amende colossale de Juul, dépassant 400 millions de dollars, pour "avoir promu la vape chez les jeunes" est une énième tentative pour les Etats américains de considérer la cigarette électronique comme une vache à lait comme il l'ont fait avec le tabac et le MSA.

    Juul s’est pris une amende gigantesque de 400 millions de dollars de plusieurs Etats américains pour avoir promu sa vape auprès des jeunes. Je n’ai aucune sympathie pour Juul, car cette entreprise est la principale responsable de la destruction de la vape aux Etats-Unis et ses ondes de choc en Europe. Mais dans mon livre, La vape qui dérange, j’avais déjà expliqué ce mécanisme qui permet aux Etats américains de faire casquer les entreprises au maximum pour s’endetter comme des porcs par la suite.

    Ci-dessous, un extrait du chapitre sur le MSA et les Tobacco Bonds

    Quand les preuves ont commencé à s’accumuler contre les cigarettiers, dire que ces derniers aient eu chaud aux fesses est un euphémisme. On avait les grandes auditions devant le Congrès et des procès, avec le potentiel de détruire entièrement l’industrie de la clope, étaient dans toutes les têtes.

    C’est là que les cigarettiers et les plaignants, c’est-à-dire les États américains passent le Master Settlement Agreement ou MSA.1 Cet accord est entre les 4 principaux cigarettiers, à savoir, R. J. Reynolds, Lorillard, Brown & Williamson et Philip Morris et les procureurs représentant 46 États américains.

    Les principes du MSA est que les cigarettiers doivent reconnaître les torts provoqués par la clope ainsi que les dépenses de santé supplémentaires que cela apporte aux États américains.

    Et que par conséquent, les cigarettiers s’accordent à verser des dommages et intérêts sur une certaine période et en échange, les cigarettiers seront protégés de toute poursuite concernant leurs produits dans le futur.

    En gros, c’est un accord à l’amiable pour éviter d’être dépecé sur la place publique pendant les procès.

    Les dommages et intérêts sont de 206 milliards de dollars à verser pendant une période de 25 ans, de la période de 2000 à 2025. En plus des dommages, on avait aussi des contraintes sur les cigarettiers, par exemple, il leur était interdit de faire la promotion de leur clope auprès des jeunes (oui, c’était autorisé à l’époque) et il leur était aussi interdit de former un syndicat.

    J’ai bien envie de rigoler devant cette dernière interdiction comme si les entreprises les plus puissantes aux États-Unis auraient besoin de former un syndicat pour devenir encore plus puissant !

    Il y a deux choses très importantes à comprendre avec le MSA et pourquoi, c’est devenue une saloperie au fil du temps. La première est que les interdictions se sont ensuite étendues à toute l’industrie du tabac et pas seulement sur les quatre fabricants impliqués dans l’accord. La seconde chose, cruciale pour comprendre le comportement des États-Unis envers la vape, est que les dommages et intérêts sont dynamiques.

    Cela signifie que chaque État américain, présent dans l’accord, reçoit un prorata des dommages et intérêts chaque année, selon le volume de cigarettes qui sont vendues dans cet État (vous voyez venir la grosse arnaque).

    Donc, imaginons que l’État de Minnesota vend 2 millions de clope en 2000, alors on calcule un pourcentage à partir de ces ventes et cet État va recevoir, disons une somme fictive, de 150 millions de dollars de dommages.

    À la base, tout cet argent devait servir à compenser les dépenses de santé, occasionnées par les méfaits de la clope et à financer des campagnes de sensibilisation sur les dangers du tabac. Mais on est en Amérique, chers amis, et ils ont dépensé cet argent dans tout, sauf pour lutter contre le tabagisme.

    Le bien commun n’existe pas dans leur vocabulaire.

    Pourquoi feraient-ils quelque chose contre le tabagisme ? Plus il y a de fumeurs dans leur État et plus, ils ramassent de l’argent chaque année. Mais évidemment, le MSA a été signé par des avocats et des politiciens qui sont des incompétents et des crétins par définition.

    Car comme les dommages et intérêts sont dynamiques, si la vente de cigarettes baisse, alors les dommages baissent aussi automatiquement. Lors de la signature du MSA, ils avaient anticipé cette baisse, à hauteur de 1,8 %, mais elle a été beaucoup plus forte que prévu de 2000 à 2010 avec parfois 4 % de baisse annuelle.

    Avant d’arriver aux effets pervers du MSA, on peut aussi revenir sur l’interdiction de publicité qui est dedans et qui a été ensuite appliquée à toute l’industrie du tabac. À votre avis, qu’est-ce qui s’est passé ? Eh bien, cela a renforcé le monopole de Big Tobacco !

    Par exemple, avant le MSA, Philip Morris dépensait environ 150 millions de dollars par an dans la publicité. Après l’interdiction, il a donc économisé les 150 millions, mais il s’en fichait puisqu’il avait déjà le monopole.

    Et si une petite entreprise de tabac débarquait sur le marché, alors elle n’avait aucune chance de réussir puisque l’interdiction de publicité s’appliquait à l’ensemble du secteur. Cela signifie que 2000 à 2025, Philip Morris va économiser 3,750 milliards de dollars.

    En fait, ce putain de MSA lui a rapporté de l’argent plutôt que de le sanctionner !

    Et c’est valable pour les autres gros cigarettiers, ils ont largement récupéré leurs mises. Car d’une part, ils étaient protégés contre les poursuites, mais ils se fichent désormais de l’Occident. Si on combine l’Europe et les États-Unis, alors on a grosso modo 140 à 160 millions de fumeurs !

    Il y en a 1 milliard au niveau mondial. Comme le MSA ne concerne que les États-Unis (et 46 États seulement), alors les cigarettiers ont pu vendre leurs produits sans aucune entrave dans le reste du monde. Aujourd’hui, l’OMS, même si elle est pourrie sur la vape, contraint Big Tobacco à freiner ses pratiques.

    Mais le fait est que le MSA a principalement profité à Big Tobacco, aux États américains et non à leurs habitants. Et les effets pervers des dommages dynamiques du MSA ont créé des effets tragi-comiques, qui non seulement, incite les États à ne rien faire pour lutter contre le tabagisme, mais aussi à combattre des mouvements comme la vape, car ces États risquent d’y laisser des plumes avec les Tobacco Bonds.

    Tobacco Bonds

    Les Tobacco Bonds sont des obligations (des prêts) des États américains envers les marchés financiers en échange d’avances sur les paiements annuels du MSA. Laissez-moi vous expliquer un peu plus clairement.

    • Quand les 46 États ont signé l’accord du MSA, ils ont compris qu’ils auraient beaucoup de cash chaque année pendant 25 ans
    • Ils se sont dit : « Puisque de toutes façons, on aura plein de pognon chaque année, demandons une avance aux marchés financiers en les garantissant avec les paiements du MSA ».
    • Les États américains se sont endettés comme des porcs de la décennie 2000 à 2010.
    • Mais ils avaient emprunté des montants selon des dommages qui correspondaient aux taux de tabagisme des années 2000.
    • Ils n’ont pas du tout anticipé la baisse du tabagisme à partir de 2010
    • Et donc, on a eu une différence entre les obligations qu’ils ont contractés et les dommages qu’ils recevaient chaque année.
    • Le résultat est qu’à chaque année qui passe, les États américains doivent de plus en plus d’argent aux investisseurs par rapport aux remboursements qu’ils reçoivent du MSA.

    Prenons un exemple, imaginons que vous êtes le Vermont et qu’en 2000, vous ayez reçu 2 milliards de dollars à titre de dommages du MSA. Mais dès le début de 2001, vous vous dites : « Pourquoi j’attendrais les remboursements de 2002, 2003 ou 2004, je vais directement emprunter cet argent sur les marchés financiers et quand ces derniers me demanderont une garantie, alors je leur dirais que de toutes façons, je le rembourserais à la fin de l’année avec le MSA ».

    C’est comme si vous deviez recevoir 1000 euros dans 10 jours (le paiement du MSA), vous empruntez 1000 euros immédiatement à un ami (le marché financier), et quand arrive les 10 jours, vous lui remboursez.

    Mais qu’est-ce qui se passe si vous recevez 900 euros au lieu de 1000 euros ? Eh bien, vous devez toujours 100 euros à cet ami. Et c’est ce qu’on appelle les Tobacco Bonds.

    Cependant, quand vous appliquez cette situation dans la complexité des États américains, de la vente du tabac et des marchés financiers, alors vous obtenez une grosse montagne de merde qui vous explosera à la gueule.

    Les États ont emprunté encore et encore, mais ils n’ont pas pris en compte les deux choses qui provoquent le déclin du tabagisme. La première est une baisse naturelle du tabagisme. Les campagnes de sensibilisation et autre ont incité les gens à ne plus fumer. De moins en moins de jeunes commencent à fumer. Mais surtout, à partir de 2014, la vape va décoller aux États-Unis et cela va se traduire par une accélération de la baisse du tabagisme. C’est pour ça que les théories de la vape comme une passerelle vers le tabagisme sont totalement foireuses.

    La vape n’incite pas les gens à retourner vers la clope, mais bien le contraire. Et il suffit de voir le graphique ci-dessous sur la consommation du tabagisme aux USA.

    L'amende colossale de Juul, dépassant 400 millions de dollars, pour "avoir promu la vape chez les jeunes" est une énième tentative pour les Etats américains de considérer la cigarette électronique comme une vache à lait comme il l'ont fait avec le tabac et le MSA.

    Déjà, on voit depuis 2000 que le tabagisme baisse plus ou moins fort, mais à partir de 2013, on a une baisse nette et massive et cela s’accélère en 2014 et 2015. La période de 2013 à 2015 est considéré comme l’âge d’or de la vape aux États-Unis, très peu de régulations et une liberté d’entreprendre absolue. Et ce sera renforcé par l’arrivée de Trump au pouvoir.

    Donc, d’un côté, vous avez des recettes en moins pour les États américains dans le MSA. Et on a mentionné que cet accord se termine en 2025 et donc, vous avez beaucoup d’États qui ont emprunté énormément, mais qui n’arrivent pas à rembourser la différence qu’ils perçoivent du MSA.

    Les analystes des Tobacco Bonds sont inquiets, car actuellement, ils atteignent plus de 96 milliards de dollars. Dès 2014, Reuters alertait que les cigarettes électroniques allaient accélérer les défauts de paiement des Tobacco Bonds et il y a des États qui sont bien plus touchés que d’autres. La Californie et New-York reçoivent les plus gros pactoles. Mais attendez une minute, n’est-ce pas ces deux États qui ont les lois les plus dures contre la vape ? Cela doit être une coïncidence. Et parce qu’il y autre chose.

    Quand les États américains ont emprunté sur les marchés, ils étaient tellement sûrs de leurs paiements du MSA qu’ils ont accepté des obligations très pénalisantes pour eux. Comme une obligation est un prêt, il y a des intérêts, bien entendu. En général, on peut payer les intérêts dès le début du prêt pour les amortir sur le long terme. Mais les politiciens américains sont tellement cons et corrompus qu’ils ont demandé que les intérêts ne soient prélevés que plusieurs années après le début du prêt.

    C’est possible, mais en général, les intérêts crèvent le plafond. Dans certains cas, vous avez des intérêts qui sont 40 à 50 fois supérieurs aux taux normaux. Et donc, les États doivent une montagne de fric croissante aux marchés et les paiements du MSA s’assèchent chaque année avec la baisse naturelle du tabagisme, mais aussi l’arrivée des outils comme la cigarette électronique. Les politiciens américains le savent et ils utilisent plusieurs moyens pour détruire la vape.

    La première est de considérer les e-cigarettes comme des clopes. Ben oui, j’ai mentionné au début de l’histoire du MSA qu’au fil du temps, les interdictions et les règles qui concernaient les cigarettiers, impliqués dans l’accord, ont été étendus à toute l’industrie du tabac, petite, moyenne ou grande. Si la vape est considérée comme du tabac, alors elle entre directement dans le MSA et donc, des taxes exorbitantes qui viendront remplir les caisses des États qui ont emprunté sans vergogne.

    Ce qui fait que les États-Unis n’ont aucun intérêt à lutter contre le tabagisme, car quand un Américain allume sa clope le matin, alors ils sont sûrs de recevoir un pactole à la fin de l’année.

    La vape qui dérange

    La vape est un outil de cessation tabagique, mais elle est attaquée de toutes parts. Si vous pensez que la cigarette électronique est dangereuse ou qu’elle ne marche pas, alors cet ouvrage va vous faire changer d’avis.

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

    Pour me contacter personnellement :

    Laisser un commentaire

    Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *