Comment la Blockchain peut-elle aider les pauvres ?
Transfert d’argent, assurance, aide humanitaire, la technologie du Blockchain possède de nombreux avantages pour aider les pauvres dans le monde entier.

Les grandes entreprises de Wall Street utilisent une technologie compliquée connue comme la Blockchain pour augmenter la vitesse des transactions de la finance internationale.1 Mais la Blockchain n’est pas uniquement pour les riches, car elle peut aider également les pauvres. Une Blockchain est une manière efficace et abordable d’enregistrer des transactions. Des personnes qui ne se connaissent pas, et donc qui ne se font pas confiance, peuvent avoir un niveau de confiance raisonnable afin de transférer de l’argent sans un risque de fraude ou de vol. Les agences d’aides humanitaires, les ONG et les Startups travaillent sur la Blockchain dans les pays pauvres afin d’aider les plus pauvres à accéder au système bancaire ou pour protéger leur économie.2
Dans mon travail de chercheur en commerce et la technologie sur l’impact de la Blockchain sur les pauvres, je vois 4 aspects de la Blockchain qui sont déjà en train de connecter les gens les plus pauvres dans le monde afin qu’ils accèdent à l’économie globale.3
Comment fonctionne une Blockchain ?
Une Blockchain est un nom ronflant pour une base de données qui enregistre des transactions provenant de différents endroits en même temps. Le meilleur exemple de la Blockchain est la cryptomonnaie Bitcoin, mais on peut appliquer cette technologie sur de nombreux domaines.4 5
Une manière d’illustrer la Blockchain est un tableau d’affichage public où tout le monde peut publier un enregistrement d’une transaction. Ces publications doivent être signées dans une certaine manière et une fois qu’elles sont publiées, on ne peut jamais changer ou supprimer un enregistrement. Les données sont stockées sur de nombreux ordinateurs sur internet qui sont répartis dans le monde entier.
Quand on combine les différents éléments qui sont la transparence sur l’écriture et la vérification et l’authentification via le chiffrement et un stockage redondant, alors on obtient un mécanisme sécurisé pour transférer de l’argent. La Blockchain peut même évoluer dans ce qu’on appelle des Smart Contracts qui sont des transactions qui se produisent uniquement si certaines conditions sont remplies.5 Par exemple, une politique d’assurance-vie qui envoie l’argent à son bénéficiaire uniquement si un médecin en particulier signifie numériquement un certificat de décès à la Blockchain.
Ces mécanismes sont déjà présents dans les pays riches sans la Blockchain. Mais c’est parce que ces pays ont adopté des régulations très strictes qui protègent l’argent des gens dans les banques et des lois qui régissent des contrats formels entre les participants. Dans les pays pauvres, ces régulations sont inexistantes et donc, ces services sont minoritaires et quand ils existent, ces services sont tellement exorbitants que personne ne peut se les payer. Par exemple, l’ouverture d’un compte bancaire dans certains pays africains nécessite d’énormes dépôts qui sont équivalents à ce qu’une personne gagne en 12 mois.6
Un système de Blockchain renforce les règles sur l’authentification et la sécurité de la transaction. Cela permet à une personne de stocker de l’argent en le sécurisant dans la mesure du possible et en bénéficiant de la confidentialité et le tout à un prix abordable. La technologie n’est pas encore pour le grand public, mais des systèmes basés sur la Blockchain aident déjà les personnes dans les pays pauvres sur de nombreux aspects.
Transférer de l’argent à l’international
En 2016, les migrants, qui travaillent à l’étranger, ont envoyé environ 442 milliards de dollars à leurs familles.7 Ce flux de cash est un facteur considérable pour la santé financière des familles et des entreprises dans les pays en développement. Mais le transfert d’argent est très cher.8

L’utilisation du Smartphone connait la plus forte croissance en Afrique
Par exemple, en utilisant le service MoneyGram, un travailleur aux États-Unis, qui enverrait 50 dollars au Ghana, devrait payer une commission de 10 dollars signifiant que sa famille recevrait uniquement 40 dollars sans oublier les frais de conversion de la devise.9 En 2015, les couts de transaction et les taux de commissions atteignent une moyenne de 10,96 % pour les envois de fond provenant des banques et 6,36 % pour envoyer de l’argent via des opérateurs privés.10 Les compagnies et les banques justifient ces commissions exorbitantes par le fait qu’elles sont nécessaires pour fournir un service fiable et sécurisé.11
En revanche, Bitspark, une entreprise basée à Hong-Kong, qui utilise la Blockchain, propose des couts de transaction de 15 dollars de Hong Kong si on transfert 1 200 dollars de Hong Kong (En gros, la commission est de 2 dollars pour un envoi inférieur de 150 dollars). 12 Pour les gros montants, l’entreprise prend 1 % de commission du montant. En comparaison, la plupart des banques prennent 10 % au minimum, mais cela peut atteindre 25 % pour certains pays. Le virement bancaire est un énorme frein pour la nouvelle Gig Economy à cause des frais exorbitants. En utilisant la Blockchain et ses connexions sécurisées, cette entreprise arrive à court-circuiter les circuits bancaires et de transfert de fond traditionnel.13 On a des services similaires qui permettent d’envoyer de l’argent aux Philippines, au Ghana, au Zimbabwe, en Ouganda, en Sierra Leone et au Rwanda à des taux défiant toute concurrence.14
L’assurance-vie et l’assurance-maladie
La plupart des personnes dans les pays en développement ne possèdent pas d’assurance-vie ou d’assurance-maladie, car c’est tellement cher par rapport à leurs revenus. En cause, on a des couts administratifs qui crèvent le plafond. Pour chaque dollar collecté dans une prime d’assurance, les couts administratifs sont de 0,28 dollar au Brésil, 0,54 dollar au Costa Rica, 0,47 dollar au Mexique et 1,80 dollar aux Philippines.15 Et les gens, qui vivent avec moins d’un dollar par jour, ne peuvent jamais se payer d’assurance et en fait, les compagnies d’assurance ne leur proposent jamais ces services.
En Inde, seuls 15 % de la population possède une assurance-maladie même si ces personnes paient une prime d’assurance plus élevée que dans les pays riches.16 Le résultat est que les personnes dans le sud de l’Asie paient davantage leurs couts d’assurance que les personnes dans les pays riches.17 18 Mais étant donné que les systèmes de Blockchain sont en ligne et qu’ils impliquent la vérification des transactions, ils peuvent réduire considérablement les couts pour les assurés tout en évitant les fraudes.19
Consuelo est un service de micro-assurance qui est financé par l’entreprise mexicaine de paiement mobile Saldo.mx. Les clients peuvent payer de petites sommes pour leur assurance-maladie et leur assurance-vie et ces sommes sont vérifiés numériquement avec un paiement très rapide.20
Pour aider les petites entreprises
Les systèmes à base de Blockchain peuvent également aider les petites entreprises qui sont souvent à court de liquidités et c’est très cher sinon impossible d’emprunter de l’argent. Par exemple, après la livraison des médicaments à l’hôpital, des petits détaillants de médicaments en Chine doivent attendre 90 jours pour être payé.21 Mais pour rester à flot, ces entreprises ont besoin de cash et ils doivent se baser sur des intermédiaires qui les paient immédiatement, mais pas en intégralité. Ainsi, une facture de 100 dollars de l’hôpital impliquera que les détaillants reçoivent uniquement 90 dollars et l’intermédiaire va collecter la totalité par la suite. Le résultat est un cercle vicieux de pertes croissantes pour les petites entreprises sur le long terme.
Et les banques ne prêtent pas de l’argent dans des endroits où les fraudes de facturation sont fréquentes et où les fabricants sont réputés pour les erreurs dans leur transaction et des couts cachés. 22 23 Un système par Blockchain réduit ces problèmes, car ces enregistrements doivent être identifiés avant d’être ajoutés aux livres de comptes et on ne peut pas les changer.
Ces détaillants chinois reçoivent de l’aide de Yijan, une Blockchain qui est un effort conjoint d’IBM et de l’entreprise Hejia qui est spécialisé dans la gestion des approvisionnements. Les entreprises d’électroniques, de vêtements et d’automobiles font face à des difficultés similaires et elles participent donc à Chained Finance, une plateforme de Blockchain qui est financé par les entreprises Dianrong et FnConn, cette dernière étant une filiale de Foxconn.24
L’aide humanitaire via la Blockchain
La technologie Blockchain peut aussi améliorer l’aide humanitaire. La fraude, la corruption, la discrimination et la mauvaise gestion bloquent totalement cette aide humanitaire et ce sont souvent des intermédiaires qui se remplissent les poches plutôt que d’aider ceux qui sont les plus démunis.25 26 27

Un programme pilote au Pakistan permet à des familles dans le besoin de recevoir de la nourriture et de l’argent via la Blockchain – Crédit : Farman Ali/UN World Food Program
Au début de 2017, le Programme alimentaire mondial (PAM) a lancé sa première étape de ce qu’il appelle comme le “Building Block” afin de donner de la nourriture et du cash à des familles dans le besoin au Pakistan.28 Un Smartphone connecté à internet authentifie et enregistre les paiements du PAM vers les vendeurs de nourriture en garantissant que les destinataires reçoivent bien l’aide qui leur est promise. Les vendeurs sont payés et l’agence garde la trace de son argent.
L’agence espère qu’en utilisant un système par Blockchain, cela va réduire les couts passant de 3,5 % à moins de 1 %.29 Et la technologie permettra d’aider des zones isolées ou frappées par des catastrophes où les distributeurs automatiques ou les banques ne fonctionnent pas.30 Dans des situations urgentes, une monnaie par Blockchain peut remplacer temporairement la monnaie locale permettant aux ONG, aux résidents et aux marchands de transférer électroniquement de l’argent.
Les Blockchains permettent également aux particuliers d’aider les pays pauvres. Usizo est une plateforme de Blockchain en Afrique du Sud qui permet à n’importe qui de payer les factures d’électricité pour les écoles communautaires.31 Les donateurs peuvent vérifier la quantité d’électricité utilisée par l’école et ils peuvent calculer l’énergie qui sera payée par leur donation afin de créditer le montant par le Bitcoin.
Le potentiel de la Blockchain dans le futur
Et dans le futur, des projets basés sur la Blockchain pourront aider les gens et les gouvernements sur d’autres aspects. On estime qu’aujourd’hui, 1,5 milliard de personnes, soit 20 % de la population mondiale, ne possèdent pas de documents pour vérifier leur identité.32 Cela les limite à utiliser les banques, mais cela les empêche également d’accéder à des droits humains fondamentaux tels que le vote, la santé, l’éducation ou le voyage.
Plusieurs entreprises lancent actuellement des programmes d’identification basés sur la Blockchain pour aider à créer et à valider les identités des personnes.33 En utilisant simplement un Smartphone connecté à internet, on photographie une personne et on enregistre des expressions faciales et vocales dans une vidéo. Les données sont enregistrées dans une Blockchain et n’importe qui peut y accéder pour vérifier l’identité de la personne. Sans le mail, le téléphone, le passeport ou même un certificat de naissance, une Blockchain pourrait être la seule manière de prouver leur identité. Cela améliorerait leur vie et leur donnerait beaucoup plus d’opportunités.
Traduction d’un article de The Conversation par Nir Kshetri, professeur de gestion à l’université de la Caroline du Nord.
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