Stable Diffusion et Midjourney : La lutte pour le Fair Use dans l’âge de l’IA


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  • Les différentes plaintes contre Stable Diffusion et Midjourney se basent sur le fait qu’elles ont utilisé des images potentiellement protégées pour apprendre à créer des images. Et leur défense consiste dans le Fair Use de ces images. Mais la nature même de ces IA nous incite à revoir entièrement ce qu’est même un droit d’auteur.


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    Les différentes plaintes contre Stable Diffusion et Midjourney se basent sur le fait qu'elles ont utilisé des images potentiellement protégées pour apprendre à créer des images. Et leur défense consiste dans le Fair Use de ces images. Mais la nature même de ces IA nous incite à revoir entièrement ce qu'est même un droit d'auteur.

    Ces derniers jours, nombre d’artistes et d’entreprises portent plainte contre des entreprises comme Stable Diffusion et Midjourney parce qu’ils estiment que ces IA “volent le travail des artistes” et qu’ils vont être ruiné. Je rigole toujours quand une entreprise comme Getty Images se permet de hurler à la violation du droit d’auteur alors que toute sa richesse vient du fait qu’elle volé sans vergogne des images dans le domaine public pour les revendre à prix d’or. Il y a des cocktails Molotov qui se perdent.

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    Les IA sont là pour rester, et même si ces procès tranchent en faveur des artistes, la manière de travailler et de créer des oeuvres va subir un changement de paradigme. L’arrivée des IA n’est pas un bouleversement similaire à celui de l’informatique, car elle est comparable à l’industrialisation qui a permis de sortir le monde de l’âge agraire. Donc, les procès peuvent ralentir ces IA, mais penser à les stopper pour protéger les artistes reviendrait à se lamenter de la disparition des tailleurs de pierre…

    Ces IA ont utilisé des millions d’images pour apprendre à créer leurs propres images et à les dessiner. Et là, déjà il y a un problème pour déterminer une violation de droit d’auteur. Car une IA, qui copie un style artistique, n’est pas coupable de droit d’auteur. De plus, il faut bien un point de départ, mais vu l’évolution actuelle de ces IA, elles pourront avoir leurs propres styles dans les 2 ou 3 prochaines années, notamment avec un projet comme Stable Diffusion qui est Open Source et gratuit (pour le moment).

    En fait, Stability.ai, l’entreprise derrière Stable Diffusion, avait déjà vu le coup venir, car avec la version 2.1, il utilise un modèle différent appelé OpenClip pour interpréter le texte. Le précédent modèle, CLIP, fourni par OpenAI, semblait poser des problèmes de droit d’auteur. Donc, là, c’est plus propre et moins sujet aux attaques. Ensuite, si des artistes veulent qu’on supprime leurs oeuvres, leurs noms et leurs styles des modèles, on peut le faire et ainsi, ils disparaitront comme tout le reste avec l’arrivée de nouvelles technologies.

    Cependant, ce n’est ce qu’ils veulent, car ils veulent simplement qu’on les paie sans comprendre la nature de l’IA et qu’un paiement est juste impossible, car c’est impossible de savoir comme l’IA pris telle image ou non et comme elle l’a analysé. Mais revenons au Fair Use et aux 4 critères obligatoires pour qu’il soit applicable. Si Midjourney et Stable Diffusion veulent bénéficier du Fair Use, il faut qu’ils respectent les 4 critères en même temps.

    Le facteur de transformation

    L’utilisation doit ajouter de nouvelles expressions ou significations à l’œuvre originale. Par exemple, une parodie transforme l’œuvre originale en la ridiculisant. Les utilisations pour la recherche, l’éducation ou la critique peuvent également être considérées comme des utilisations transformatives.

    Pour ce critère, les IA gagnent haut la main, car par essence, elles modifient toutes les images qu’on leur donne. Donc, ce critère là est respecté sur plusieurs niveaux. Les images sont utilisés pour développer la recherche en IA et ce qu’elles créent est totalement différent de l’original.

    La nature de l’œuvre protégée

    Vous avez plus de liberté pour copier des œuvres de nature factuelle comme les biographies, plutôt que des œuvres de fiction comme les pièces de théâtre ou les romans. De même, vous avez plus de chances de pouvoir justifier une utilisation équitable si vous copiez à partir d’une œuvre publiée plutôt que non publiée.

    Ce critère ne s’applique pas à l’IA en soi, car cela parle surtout des oeuvres inédites. En général, elles s’inspirent d’images qui sont déjà présentes sur le web depuis des années et qui ont déjà été copiées et recopiées des centaines de fois. Cependant, sur l’aspect fictionnel, cela peut poser un problème, car les IA s’inspirent beaucoup des artistes à l’état pur, en même temps, elles n’apprendront pas grand chose d’un peintre en batiment.

    La quantité et la pertinence de la partie utilisée

    Moins vous utilisez, plus il est probable que l’utilisation soit considérée comme équitable. Cependant, même si vous utilisez une petite partie d’une œuvre, cela ne sera pas considéré comme une utilisation équitable si la partie utilisée est l’essence même de l’œuvre. Par exemple, il ne serait probablement pas considéré comme une utilisation équitable de copier le riff de guitare d’ouverture et les paroles “I can’t get no satisfaction” de la chanson “Satisfaction”.

    C’est le véritable problème, car ce critère ne s’applique pas du tout à l’IA, car son fonctionnement est totalement différent. Quand il analyse une image, Stable Diffusion va rajouter tellement de bruit à l’image qu’elle va devenir une bouillie de pixels, impossible à comprendre. Ensuite, les modèles mathématiques interviennent pour reconstruire l’image à partir de cette bouillie. Cela va être aussi le noeud du procès qui sera de faire comprendre cette procédure complexe à des juges qui sont nés à l’époque de la TSF !

    Il ne faut pas qu’on se prenne une répétition de l’audition lunaire de Zuckerberg au Congrès où il n’a jamais réussi aligner trois mots de suite pour que les juges comprennent comment fonctionnait l’algorithme de Facebook ! Le fait de dire que l’IA s’inspire de la totalité de l’image n’a absolument aucun sens et c’est pourquoi, c’est le concept même du droit d’auteur et du Fair Use qui doit être réformé.

    L’effet de l’utilisation sur le marché potentiel

    Il est important de considérer si l’utilisation privant le propriétaire des droits d’auteur de revenus ou de créer un marché concurrentiel pour l’œuvre protégée. Deprivant un propriétaire des droits d’auteur de revenus est très susceptible de déclencher une poursuite judiciaire. Par exemple, si un artiste utilise une photographie protégée sans autorisation pour créer des sculptures en bois et gagne de l’argent en les vendant, il sera considéré comme illégal car cela crée un marché concurrentiel pour les sculptures de cette photographie.

    Dans cet aspect, les IA ou plutôt leurs utilisateurs sont coupables. Car à partir du moment on peut créer des images sur n’importe quoi, avec n’importe quel style, alors les artistes ne pourront jamais rivaliser avec leurs petites mains humaines. Cependant, c’est l’évolution naturelle de la technologie.

    Pourquoi devrait-on sacrifier la technologie pour perpétuer des métiers qui sont de toutes façons condamné à disparaitre ? De plus, quand on regarde les personnes qui se sont approprié ces IA, ce sont principalement des artistes. Ne serait-ce pas en mode : “Ok, nous, on peut utiliser des IA pour nous faciliter le travail, mais c’est NON pour le péquenot de base“.

    C’est l’utilisateur qu’on doit incriminer, pas l’outil. Car dans ce cas, il faudrait interdire le protocole BitTorrent, car cela permet de pirater. Et pour les utilisateurs qui “volent le travail des artistes”, eh bien, que les artistes se débrouillent avec eux, pourquoi emmerder les IA ?

    Entre les IA et les artistes, le choix est vite fait

    Les artistes ont été les premiers à s’emparer des nouveaux outils technologiques. Les logiciels de dessin, de retouche photo, de tablette graphique, ce sont autant d’outils qui ne permettent que d’exprimer la créativité de l’artiste. Stable Diffusion et Midjourney franchissent une nouvelle étape en permettant à tout le monde d’exprimer sa créativité en supprimant la partie technique. C’est sûr que la valeur marchande de ces quelques artistes vont descendre aux enfers, mais la valeur marchande du secteur va devenir exponentielle dans le futur.

    On peut prendre l’exemple du cinéma. Dans les années 40 ou 50, on avait des centaines de personnes qui fabriquaient les décors à la main. Les maçons, les charpentiers, les peintres. Ensuite, l’informatique est arrivé avec les effets spéciaux. Et aujourd’hui, on peut créer un univers entier avec des planètes habitées en quelques jours. Est-ce que cela a détruit le cinéma pour autant ? Au contraire ! Cela a permis de créer plein de nouveaux métiers avec des personnes spécialisées dans chaque domaine. Je n’ai pas vu ces artistes se lamenter de la perte d’emplois des maçons et des charpentiers de l’époque.

    Et en termes de valeur marchande, les bénéfices d’un film en 2022 sont 100 000 fois plus élevés que ce que rapportait un film des années 40 ou 50 avec un cout de la production qui a aussi crevé le plafond. Si on avait banni les technologies des effets spéciaux, juste pour protéger les métiers de l’époque, alors le cinéma aurait disparu, car les attentes des spectateurs sont beaucoup plus exigeantes qu’à l’époque.

    Le droit d’auteur ne s’applique pas non plus à l’IA, car une fois qu’elle a créé une image, elle peut la modifier à l’infini. Alors que pour un dessinateur, une fois qu’il a terminé sa planche, il ne la touchera plus. Pour une IA, on peut lui demander 100 millions d’itérations d’images et chacune de ces 100 millions est une oeuvre originale.

    Si le lobby du droit d’auteur s’en mêle, alors ces procès tourneront bien pour les artistes, mais ce sera temporaire. Et surtout, cela peut occasionner une fuite des cerveaux et des technologies vers des cieux plus cléments. L’Occident a amorcé sa fin, ces technologies arrivent dans un monde plus morcelé que jamais et si on empêche ces IA de se développer à Washington ou à Bruxelles, alors Pékin, Moscou ou New Delhi seront ravi de s’en emparer.

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    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

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