Madagascar : L'indépendance des magouilles

J’ai commencé à m’exprimer politiquement en 2009 lors du Coup d’Etat et avant chaque 26 juin, vous avez plein de commentaires et d’analyses qui se posent cette question : Est-ce que Madagascar est indépendant ? Et donc, cela fait 15 ans que la réponse est un NON massif et ce Non s’accentue d’année en année. Alors que le monde change sous nos yeux, que tous les pays, qui étaient soumis, se réveillent et se nationalisent à toute vitesse, les élites malgaches se complaisent dans la servilité absolue comme des putes de bas étages ayant trouvé leur client idéal.

Car à quelques jours du 26 juin, les ministres des finances et des affaires étrangères se gargarisent, roucoulent d’avoir trouvé un accord avec le FMI pour avoir 600 millions de dollars sur 3 ans. Cela signifie que le FMI et la Banque Mondial vont mettre davantage leur nez dans les affaires internes, n’oublions qu’ils sont allés jusqu’à fixer notre prix de l’électricité. Depuis son histoire, ces deux institutions n’ont jamais fait que détruire des pays entiers, leurs politiques s’attaquent surtout aux plus pauvres, il suffit de voir l’exemple du Kenya, de donner la part belle aux multinationales et de débiter les mêmes insanités insipides depuis des décennies, juste pour suivre une théorie économique qui sent le faisandé.

Pour tous les pays, revenir au FMI et à la Banque mondiale est une défaite de la pire espèce, l’Angleterre, quand elle a dû demander de l’argent au FMI après la Seconde guerre mondiale, a considéré que c’était la fin du Royaume-Uni. Même les pays les moins avancés considèrent le FMI et la Banque mondiale comme des dealers de coke qui vous emmèneront à la mort, mais à Madagascar, on les glorifie en se trémoussant le cul dans une danse de la victoire, les élites malgaches et les oligarques détestent tellement ce pays que chaque occasion de le détruire est un moment de joie parce que de toutes façons, quand les cadavres s’entasseront, car ces deux institutions ont déjà demandé des réductions drastiques du budget et des coupes nettes dans les principaux ministères, ces élites partiront en France qui est leur véritable patrie. Le colon n’a pas toujours la peau blanche…

c’est pour ça que j’ai apprécié la présidence de Hery Rajaonarimampianina, car il prenait ses distances avec Brettons Woods pour embrasser la multipolarité avec la Chine. Rajoelina a tout détruit en arrivant au pouvoir et aujourd’hui, nous sommes dans le camp des perdants.

A cela s’ajoute l’arrivée tant attendue du téléphérique. Il l’a quand même eu, le DJ, son téléphérique. Il l’a chanté à tue-tête, il nous a endetté de 151 millions d’euros même si on nous dit, la main sur le coeur, qu’il est partiellement financé par le Trésor Français, mais de toutes façons, personne ne donne jamais rien gratuitement et on le finira par payer d’une manière ou d’une autre.

En soi, le projet est bien, ils ont bien fait le truc, ça marche nickel, mais toute la question est de savoir s’il ne va pas terminer comme les myriades de projets du DJ, lancement en grande pompe, descente aux enfers avec le projet qui pourrit dans un coin. Parce que quand le projet a été annoncé, on a fait le calcul de sa rentabilité. Même s’il fonctionne à taux plein pendant toute la durée de l’exploitation qui va de 10 à 15 ans, on arrive à peine à 90 millions d’euros et ce, pour un billet à 4 000 ariary alors qu’il a été fixé à 3 000 ariary. Pour la faire courte, ce machin ne sera jamais rentable, de plus, ce sont des sociétés françaises qui vont l’exploiter et donc, le pognon va retourner en France, merci pour le cadeau.

La population crie pour des frais de 600 ariary pour les taxi-be et on pense que tout le monde va prendre ce téléphérique à 3000 ariary. Donc, si un mec fait deux trajets pour son travail, cela fait déjà 180 000 ariary par mois, le salaire minimum, qui n’est jamais respecté à Madagascar, est de 250 000 ariary, donc, les crétins pensent qu’un mec va dépenser 72 % de son salaire mensuel pour le transport. Après évidemment, pour les touristes et les 5 % qui s’engraissent comme des porcs, oui, cela va être une occasion de faire comme les occidentaux, de toiser les manants que nous sommes en dessous de leur hauteur cadavérique.

La première ligne allant de Carlton à la Petite vitesse n’est pas du tout intéressante, honnêtement, je peux le faire à pied. Après, si ça couvre de grandes parties de la ville, cela peut être intéressant de temps en temps, car objectivement, il est moins cher que le taxi et nous évite les embouteillages. Mais on ne prend pas le taxi tous les jours et ça va être la même chose pour ce téléphérique, les gens vont le prendre quelques fois par an quand ils sont pressés et cela va être un truc de luxe comme le reste. Et surtout, quand vous avez le ministre des transports qui nous dit qu’il va donner des trajets gratuits, vous savez que c’est mal parti. Un service demandé coute cher, mais si vous bradez le prix à 100 % au lancement, c’est que votre machin n’intéresse personne et qu’il ne vaut rien !

Ensuite, il fallait voir la vidéo d’inauguration avec le président Rajoelina, il y a deux scènes qui montrent que la présidence de Rajoelina est au bord du gouffre. La première est que dans la cabine, il y avait l’ambassadeur de France, le DG de Colas et d’autres français… En même temps, il est avec les siens… Rajoelina a une soif de la reconnaissance qui est maladive. Car la seconde scène, quand il arrive au bord d’une baie vitrée surplombant la Petite Vitesse, il se met à agiter de la main comme une marionettte, les mecs en dessous s’en foutaient, ils ne le voyaient même pas, mais dès qu’il y a un bain de foule, sa main s’agite comme un réflexe disant : Aimez-moi sinon je vous tue. A une époque, il y avait aussi un dirigeant du coté de l’Allemagne qui agitait la main dans les bains de foule, ça ne s’est pas bien terminé.

Cette soif de reconnaissance est telle que pour la moindre occasion, il fait des tournées dans tout le pays. Sa nouvelle lubie est de promouvoir la vaccination contre la polio comme si on n’avait pas un Ministre de la santé ou même un Premier ministre, Christian Ntsay est tellement absent, invisible qu’il n’est que l’ombre de l’ombre de Rajoelina. Et cette hyper-présidence dénote une absence cruelle de souveraineté. La parole d’un souverain est précieuse et rare, car chaque mot pèse son poids, c’est pour ça qu’il ne s’exprime que dans de rares occasions ce qui était le cas de Rajaonarimampianina.

Le président est toujours en retrait et c’est le Premier ministre qui fait tout. En revanche, si vous n’avez plus aucune souveraineté, que toutes vos politiques sont dictées par des étrangers, que vous n’êtes plus que le concierge du pays, alors vous ouvrez votre gueule à tout bout de champ. Comme un concierge qui se mêle de la vie de tous les résidents d’un immeuble alors que ce ne sont pas ses affaires. Vaccination contre la polio, je vais parler de vaccination, un truc religieux, j’enfile ma soutane et je parle de Dieu, un truc sportif, j’enfile mes crampons ou je deviens ceinture noire de bullshit. Tout est bon pour se faire mousser, car on n’a rien d’autre à dire.

Quand le président Vladimir Poutine parle, tout le monde écoute et décortique chaque mot, la même chose pour Xi Jinping ou Narendra Modi, car ce sont des souverains, chacun de leur mot peut déterminer la paix ou la guerre dans le monde. Quand Rajoelina parle, le péquenot qui balaye les ordures à la Petite Vitesse n’en a strictement rien à foutre. C’est un moulin à paroles sans aucune action concrète.

Car quand on regarde ce qu’il devrait faire :

  • L’inflation a détruit le pays depuis 2021 et il n’a absolument rien pu faire malgré plusieurs changements de gouvernement
  • Nous avons 1,2 millions d’extrêmes pauvres en plus et il n’a rien pu faire
  • Pour 2024, notre déficit est de 800 millions de dollars et il n’a rien pu faire
  • Les prix des soins ont explosés et il n’a rien pu faire
  • La question des Iles Eparses fait désormais partie des Contes et Légendes

Il n’y a rien de rien. Cependant, il y a un peu d’industrialisation, on ne peut pas le nier, mais c’est le même problème que tous ses projets foireux. Il ne suffit pas de donner des machines dans telle ou telle ville, il faut assurer le suivi et faire en sorte que cela devienne rentable. Et la priorité est les routes qui ressemblent à une zone de guerre. Même si les mecs fabriquent des produits finis, le cout du transport fait qu’ils seront invendables. L’exemple est les moutons, un mouton entier à Fort-Dauphin coute 30 000 ariary, à Tana, il est à 200 000, c’est quoi la différence ?

Le mouton ne s’est pas revêtu de la Toison d’Or pendant le trajet, mais ce sont les couts de transport. Et pire encore, cette viande est exporté vers la Réunion ou Mayotte à des prix plus coutants que sur les étals de Tana. C’est à dire que pendant que les malgaches se gavent d’Angivy parce que c’est le moins cher et amer comme la quinine, nos ressources, qui sont cruciales pour notre souveraineté alimentaire, partent à l’étranger. C’est la même chose pour les produits maritimes, exorbitants pour la majorité des malgaches alors qu’on vit sur une putain d’île !

Ensuite, même si on fait les produits locaux, si vous ne mettez pas du protectionnisme hardcore sur les produits importés, monopole des oligarques, les produits locaux seront toujours plus cher puisqu’eux, ils sont obligés de respecter les lois. Si vous voulez une industrie florissante en circuit fermé, il faut taxer massivement toute merde étrangère ou les bannir. Mais si vous prononcez le mot même de protectionnisme, le FMI et la Banque Mondiale vont vous arracher la peau. Je prédis que toutes ces initiatives industrielles vont pourrir dans leur coin dans quelques années à cause du manque de suivi et de l’absence du soutien de l’Etat.

Bonne fête à l’administration coloniale, mais un jour peut-être, dans quelques décennies ou siècle, les gens comprendront ce que c’est la liberté et la souveraineté.

 

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