Quasi Hoax : Une baie australienne peut guérir le cancer en 48 heures


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  • On a des articles et des publications sur les réseaux sociaux qui prétendent qu’une baie australienne connue comme la baie de Blushwood peut guérir le cancer en 48 heures. C’est quasiment un Hoax. La baie possède une substance qui montre des résultats prometteurs contre certaines tumeurs chez les animaux, mais les essais cliniques sont encore en phase 1 pour les humains. De plus, le cancer existe en des dizaines de variantes.


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    On a des articles et des publications sur les réseaux sociaux qui prétendent qu'une baie australienne connue comme la baie de Blushwood peut guérir le cancer en 48 heures. C'est quasiment un Hoax.

    Le 2 décembre 2016, le site Anonnews.co publie un article intitulé Les scientifiques ont découvert qu’une baie australienne guérit le cancer en 48 heures.1 L’article concerne principalement une vidéo de la 7News Sydney qui l’avait diffusé en aout 2016.2

    L’EBC-46 est prometteur contre certains cancers

    La vidéo décrit les développements sur les essais en pré-clinique d’une substance chimique potentielle qui peut détruire les tumeurs. La substance est présente dans une plante endémique connue comme la baie de Blushwood (Fontainea picrosperma).3 On a découvert ce composant, connu comme l’EBC-46 le 1 octobre 2014, quand des chercheurs ont publié les résultats d’une étude dans la revue PLoS One qui montrait une destruction complète de tumeurs sans aucune rechute chez 75 % des souris qui ont été traité avec une injection directe d’EBC-46.4 Et dans certains cas, cette destruction de tumeurs s’est produite en 48 heures. Le Dr Glen Boyle, le principal auteur de l’étude, avait déclaré à cette époque que le composant fonctionne en 3 étapes.3 Il tue directement la tumeur, il coupe l’irrigation sanguine et il active le système immunitaire de l’organisme pour nettoyer derrière.

    En proposant des hypothèses aussi larges que le Grand Canyon, les chercheurs pensent que ce composant fonctionne en activant une enzyme Kinase C même si les mécanismes sont encore inconnus.5 Cette étude a été menée par des chercheurs du QIMR Berghofer Medical Research Institute au Queensland en Australie ainsi que l’entreprise pharmacologique QBiotics. C’est QBiotics qui a découvert ce composant et il a déposé un brevet.6 Cette firme se concentre pour trouver des composants chimiques prometteurs dans les plantes des forêts humides d’Australie.

    Des tests sur les animaux et les humains sont en cours

    Depuis la publication de l’étude, QBiotics a mené d’autres recherches sur 2 applications parallèles. La première est un médicament vétérinaire pour les animaux domestiques et un médicament anticancéreux chez les humains. Selon QBiotics, les études sur les animaux ont été suffisamment un succès pour qu’on lance une phase d’essai clinique où on va l’utiliser comme un médicament sur les chiens et les chevaux tandis que d’autres essais sont prévus sur les chats.7

    Dans le traitement de 100 chiens, chats et chevaux, les injections intralésionnelles d’EBC-46 ont réussi à provoquer des ablations ou une réduction considérable de la progression de tumeurs qu’on considère comme étant inopérables (les mélanomes, les sarcomes, les carcinomes, les mastocytomes et les sarcoïdes) sans provoquer des effets secondaires sur le long terme. Une autre variante de l’EBC-46 a été utilisée pour traiter avec succès des carcinomes épidermoïdes chez les chats et les chevaux.

    Et QBiotics a également lancé un essai clinique de phase de 1 de l’EBC-46 chez les humains.8 Ainsi, cet essai va inclure des patients atteints de mélanome, de tumeurs cérébrales, du cancer de la gorge, de certains cancers de la peau ainsi que le carcinome à cellules de Merkel. On peut trouver les détails de l’essai clinique sur l’Australian New Zealand Clinical Trial Registry avec la requête QBiotics.9 Un essai clinique de phase 1 concerne un petit groupe de 20 à 80 personnes pour déterminer le niveau de dosage et les effets secondaires.10

    Aucun test sur les diables de Tasmanie

    Ce type d’Hoax va être semé avec une graine de vérité qui est l’étude publiée sur PLoS One, mais au fil du temps et selon sa propagation sur les articles, l’Hoax va être “enrichi” avec des éléments nouveaux, totalement faux, pour éviter de passer pour du copier-coller. Parmi les nouveaux éléments, on a le fait que les chercheurs ont remarqué que les animaux mangeaient ces fruits et qu’ils recrachaient leurs graines.11 On a lu l’étude ainsi que les essais cliniques de Qbiotics et on n’a jamais vu la moindre mention. Et pour cause, c’est Qbiotics qui a découvert les propriétés de l’EBC-46. Cette histoire d’animaux est une variante de l’Appel à la Nature.12 L’argument est que les animaux sont plus “sages” et qu’ils connaissent des secrets par rapport aux “humains” qui se basent trop sur la science. Le second élément est qu’on a testé l’EBC-46 sur les chats, les chiens et les chevaux (vrai), mais également sur les Diables de Tasmanie. Ouhh ! Sérieux ? Encore une fois, on a lu l’étude et on ne trouve aucune mention sur des tests concernant le diable de Tasmanie. L’étude de PLoS concernait uniquement les souris tandis que Qbiotics a testé le composant sur les animaux domestiques. Cet argument est vraiment bien choisi, car il permet de faire un lien inexistant entre 2 actualités réelles juste pour renforcer la légitimité de l’Hoax. Le diable de Tasmanie est affecté par un cancer très particulier qui est transmissible par la morsure.  En fait, cet animal est touché par 2 cancers transmissibles et ce qui est intéressant est que le Diable de Tasmanie a développé une résistance contre le premier cancer. Donc, on a 2 actualités réelles, mais qu’on a connecté à cette baie alors que cela n’a rien à voir. Et il est risible que les personnes, qui propagent cette rumeur de test sur le Diable de Tasmanie, n’ont pas réfléchi une petite seconde à la stupidité de leur argument. Le Diable de Tasmanie est une espèce protégée depuis 1941 et donc, comment pourrait-on faire des tests sur cet animal alors que l’éthique sur les tests des animaux comme des souris et des animaux domestiques est déjà draconienne.13

    Des résultats prometteurs ne signifient jamais un “traitement miracle”

    Donc, le composant EBC-46 est vraiment prometteur, mais le problème est qu’on ne doit pas mettre la charrue avant les boeufs. Et surtout, c’est horripilant de lire des choses telles que Rien ne peut faire mieux que la nature sur les réseaux sociaux par des blogs et des personnes adeptes de la “médecine naturelle”.14 Et les publications s’accompagnent toujours sur le fait que l’industrie pharmaceutique n’investira jamais sur un traitement naturel du cancer.

    Mais l’EBC-46 comme de nombreux médicaments proviennent de la nature.15 Mais il serait fallacieux de suggérer que la plante a créé un traitement contre le cancer par magie et que l’industrie pharmaceutique ne va pas investir dedans. Il a fallu 8 ans de recherche et de développement pour isoler et tester les effets de l’EBC-46 et c’est la firme QBiotics qui possède l’intégralité du brevet.3 4

    Encore une fois, les résultats sont prometteurs, notamment chez les animaux, mais pour le moment, on n’a démontré aucune efficacité chez les humains. De plus, le cancer n’est pas une seule maladie. Et même si l’EBC-46 pourrait détruire certains types de tumeurs, l’EBC-46 ne sera jamais “un traitement contre le cancer”. Et même si on est impressionné par le fait que ce composant soit testé dans une phase 1 pour les humains, il faut comprendre que de nombreux médicaments testés ne passent jamais ce test à cause du manque d’efficacité ou d’effets secondaires trop importants.16 L’aspect problématique avec ceux qui s’extasient en parlant de cette substance est que cela suggère qu’il suffit de manger la baie de Blushwood pour guérir du cancer.

    Sources

    1.
    Scientists find Australian berry to cure cancer in 48 hours! Anonews. http://www.anonews.co/berry-cancer-cure/. Accessed December 10, 2016.
    2.
    Scientists find Australian berry to cure cancer. 7news. https://au.news.yahoo.com/video/watch/32342411/scientists-find-australia-berry-with-ebc46-cures-types-of-cancer/#page1. Published August 15, 2016. Accessed December 10, 2016.
    3.
    Qld scientists discover cancer-fighting berry. ABC News. http://www.abc.net.au/news/2014-10-07/queensland-scientists-discover-cancer-fighting-berry/5796106. Published October 7, 2014. Accessed December 10, 2016.
    4.
    Boyle GM, D’Souza MMA, Pierce CJ, et al. Intra-Lesional Injection of the Novel PKC Activator EBC-46 Rapidly Ablates Tumors in Mouse Models. Wang QJ, ed. PLoS ONE. 2014;9(10):e108887. doi: 10.1371/journal.pone.0108887
    5.
    Mochly-Rosen D, Das K, Grimes KV. Protein kinase C, an elusive therapeutic target? Nat Rev Drug Discov. 2012;11(12):937-957. doi: 10.1038/nrd3871
    6.
    Frequently Asked Questions. Qbiotics. https://qbiotics.com/index.php/faq#faq2.
    7.
    QBiotics – EBC-46 – Animals. Qbiotics. https://qbiotics.com/index.php/vet-pipeline/ebc-46-animals. Accessed December 10, 2016.
    8.
    QBiotics – EBC-46 – Humans. Qbiotics. https://qbiotics.com/index.php/human-pipeline/ebc-46-humans. Accessed December 10, 2016.
    10.
    Phases of clinical trials. Australian New Zealand Clinical Trial Registry. https://www.australianclinicaltrials.gov.au/what-clinical-trial/phases-clinical-trials.
    11.
    Une découverte scientifique prometteuse : ce fruit détruirait les tumeurs cancéreuses! Sain et Naturel. http://sain-et-naturel.com/nouvelle-decouverte-tumeurs-cancereuses.html. Published April 23, 2016. Accessed December 11, 2016.
    12.
    Appel à la Nature. La Menace Théoriste. http://menace-theoriste.fr/appel-nature/. Published September 24, 2016. Accessed December 11, 2016.
    14.
    Page Anon sur Facebook. Facebook. https://www.facebook.com/anonews.co/posts/1413875878623967. Accessed December 10, 2016.
    16.
    The Solution to Drug Prices . New York Times. http://www.nytimes.com/2015/09/09/opinion/the-solution-to-drug-prices.html?_r=0. Published September 9, 2016. Accessed December 10, 2016. [Source]

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

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