Corruption chez Altice : le scandale qui ébranle l’empire de Patrick Drahi

Le groupe de télécoms et de médias Altice, fondé par le milliardaire Patrick Drahi, est secoué par un scandale de corruption qui éclabousse son bras droit Armando Pereira, arrêté mi-juillet au Portugal. Ce dernier est soupçonné de s’être enrichi aux dépens de l’entreprise, en utilisant des sociétés écrans pour détourner des fonds et éviter l’impôt. Il est mis en examen pour onze délits de corruption et de blanchiment d’argent.

Patrick Drahi, qui a bâti son empire à coups d’acquisitions financées par la dette, doit faire face à la défiance des marchés et des autorités, qui pourraient s’intéresser de plus près à ses montages financiers complexes et à ses méthodes de gestion prédatrices. Le magnat des télécoms, qui possède notamment SFR et BFM en France, a tenté de rassurer ses créanciers lors de conférences en marge de la publication des résultats d’Altice International et d’Altice France.

Mais le scandale portugais pourrait avoir des répercussions dans d’autres pays où le groupe est présent. Selon le site d’investigation Blast, qui a eu accès à 450 000 documents internes au groupe, la justice française pourrait être tentée de passer au peigne fin les pratiques d’Altice, notamment en matière fiscale. Le Parquet national financier (PNF) n’a pas souhaité communiquer à ce stade.

Patrick Drahi était-il au courant des agissements de son associé historique, avec qui il a créé Altice en 2002 ? (question réthorique…) Le groupe se dit victime des mauvais comportements de son numéro 2, mais certains documents internes laissent penser qu’il était au moins informé des flux financiers suspects. Selon Le Monde, Altice France a suspendu un de ses dirigeants, proche d’Armando Pereira, dans le cadre de l’enquête portugaise.

Le scandale de corruption vient fragiliser un groupe déjà confronté à une forte concurrence sur le marché des télécoms et à une dette colossale, qui dépasse les 30 milliards d’euros. Altice a engagé un vaste programme de cessions d’actifs pour réduire son endettement, mais il doit aussi faire face à la remontée des taux d’intérêt et à la méfiance des investisseurs. Patrick Drahi a récemment retiré son groupe Altice Europe de la Bourse d’Amsterdam, où il était sous-évalué à ses yeux, pour se libérer de la contrainte des marchés.

Le milliardaire franco-israélien, né au Maroc en 1963 et arrivé en France à l’âge de 15 ans, est connu pour son ascension fulgurante et son sens avisé du risque. Il a su profiter de la confiance des marchés pour réaliser des acquisitions audacieuses, comme celle de SFR en 2014. Il a également étoffé son portefeuille audiovisuel en reprenant RMC et BFMTV. A titre personnel, il s’est invité au capital de BT, l’opérateur britannique historique, et s’est offert la prestigieuse maison de vente aux enchères Sotheby’s en 2019.

Mais le scandale de corruption chez Altice pourrait ternir l’image du milliardaire et remettre en cause sa stratégie. Patrick Drahi va-t-il réussir à sauver son empire ou va-t-il vaciller face aux enquêtes judiciaires et aux pressions financières ? L’avenir du groupe Altice dépendra sans doute du sort réservé à son bras droit Armando Pereira, qui risque jusqu’à 12 ans de prison au Portugal.