L’IA a tué les rédacteurs, les traducteurs et les transcripteurs

“Je cherche du travail suite à la suspension de mon contrat à cause de l’IA”, “pouvez-me trouver un boulot, traducteur depuis 6 ans et se retrouve sans boulot à cause de l’IA”, “bonjour, je cherche n’importe quel contrat, rédacteur et transcripteur depuis 3 ans et se retrouve sans emploi à cause de l’IA”. Depuis le mois de juin 2023, ces annonces pullulent sur les groupes de freelancing sur Linkedin ou Facebook, principalement des groupes de sous-traitante, mais ce sont des phénomènes mondiaux. L’IA en est clairement responsable, mais cela montre aussi l’image d’une société complètement en faillite, le monde entier entre en récession et les métiers de services, qui ne survivent que par l’industrie, doivent être décapités.

Je suis rédacteur depuis 2009 et en fait, dans mon bled, j’ai été le précurseur de nombreuses choses. Aujourd’hui, j’ai délaissé ce métier puisque mes sites me permettaient de vivre, mais j’ai été obligé de m’y mettre, car Adsense, les sponsos et consorts ne servent plus à rien. L’IA est arrivé depuis moins d’un an et c’est un véritable massacre dans des secteurs entiers. Des plateformes comme Fiverr, Come Up ou Upwork sont obligés de réduire drastiquement leurs conditions et d’acheter beaucoup de pubs pour attirer les clients, mais ces derniers préfèrent se connecter à ChatGPT parce que c’est gratuit et ça fait le travail quotidien d’un rédacteur en 10 minutes.

Evidemment, les chantres et les escrocs de ce secteur, parasites dans l’âme, vous diront que non, le rédacteur, le traducteur, le transcripteur a encore sa place. Car vous savez, la créativité est encore l’exclusivité humaine, toutça. Sauf que la totalité du contenu sur le web pue la médiocrité extrême et des informations recyclées encore et encore. Le rédacteur ou le traducteur, il n’est pas payé pour pondre un essai sur la lutte des classes ou le modèle économique d’Erik Reinert, non, on lui demande des articles pour des jeux d’argent, des VPN, des fiches de produit de merde, des merdes chinetoques par milliers, afin d’alimenter la quintessence même de l’anti-commerce avec des poubelles de droppshipping où t’es un commercant sans produits et sans responsabilité.

Et si ce ne sont pas des merdes en plastique, on va te demander d’écrire sur du cul pour des sites tout aussi pourris les uns que les autres. On va enrober tout ça dans des grosses couvertures d’arnaques sur la “communication visuelle”, “l’écriture persuasive”, le “marketing de contenu”, mais à la fin de la journée, t’es un pisseur de mots qui tentent d’arnaquer des gens comme un colporteur avec sa valise remplie de sirop guérit-tout. On peut tourner les choses de toutes les manières, mais fondamentalement, tous les métiers de freelancing sont des bullshit jobs qu’on a déguisé en savoir-faire fantôme.

Et pour le contenu médiocre, ChatGPT et ses copains sont très forts. Moi même, je l’utilise régulièrement et je ne vole le pain de personne, car j’ai toujours été fauché pour recruter qui que ce soit. Malheureusement, j’ai l’âme trop honnête et trop innocente pour être un escroc et c’est bien dommage dans ce monde de merde.

A la base, tous ces métiers étaient juste des “petits boulots” partiels, propres à l’économie de pays pauvres. Quand j’ai commencé, du haut de ma trentaine, pensant devenir un Robespierre intellectuel et devenant davantage Christophe Colombe à la fin de sa vie aka endetté, fauché et atteint de la peste, la plupart de ceux qui faisaient ces boulots étaient des étudiants pendant l’été ou des mères au foyer pour pouvoir acheter des escarpins à 10 balles. Ensuite, le secteur s’est “professionnalisé” aka des parasites qui ont commencé à ponctionner d’énormes commissions à la fois sur notre travail payé au lance-pierre, mais aussi sur les paiements, que tous les bites molles du marketing l’ont embellis avec des mots inventés et des concepts foireux pour plaquer un jargon inintelligible pour un semblant de neurones sur une coquille saturé d’arnaques et fondamentalement vide de créativité.

Il était logique que l’IA vienne nous remplacer, car nous nous sommes cantonnés dans la médiocrité. Nous avons donné le web à des géants qui ne vivent que par la fièvre consumériste la plus crasse et la plus bête au monde. Car le consommateur intelligent est un oxymore. Combien de blogs ou de sites avec des poèmes, de vraies oeuvres littéraires, de vrais billets de réflexion peuvent gagner leur vie avec ce modèle. Zéro ! Vendez un VPN et vous mangerez, vendez la réflexion et la créativité et tout le monde vous traitera de ringards et vous allez devoir diner à la soupe populaire.

Maintenant, quel est l’avenir du rédacteur, du traducteur, du transcripteur et de toutes ces basses tâches qu’on a coagulé dans le vêtement rutilant du freelancing. Elles sont voués à disparaitre ! De l’extinction massive ! Le capitalisme, qui gouverne actuellement l’économie numérique, se base sur la réduction de plus en plus des couts pour que seules ces entreprises puissent tout contrôler de a à z. Le contenu était une vraie épine dans leur pied, l’IA va les sauver de ça. On se souvient qu’il y a quelques années, Snapchat avait lancé un programme de contenu original en payant des créateurs, au bout de trois mois, le machin a été abandonné, car ils se sont aperçus que le contenu de qualité coutait la peau des fesses !

Donc, l’IA, sous des prétextes de modernité, va leur servir à contrôler l’alpha et l’oméga. Ils n’ont plus besoin de créateurs de contenu, car même 10 euros le texte de 500 mots, c’est trop cher pour eux. C’est pour ça qu’on voit un véritable bain de sang publicitaire en ce moment, Google truque clairement le jeu pour arnaquer les éditeurs, les revenus sont juste une descente aux enfers depuis plusieurs mois. Ils vont assécher tout ce qui est possible d’assécher et ponctionner tout ce qui peut l’être auprès des créateurs individuels et fonctionner en circuit fermé, c’est l’objectif du SGE, ce moteur de recherche Google entièrement alimenté par les IAs. C’est du faux contenu ? De la merde ? C’est médiocre ? Qu’importe, de toutes façons, personne ne fait plus la différence entre du beau et du laid, du vrai et du faux, ce qui a de la valeur et ce qui est de la camelote.

Et je l’avais déjà dit dans mon livre, le Basilic de Roko, que dans le futur, on va prétexter les progrès de l’intelligence artificielle pour détruire définitivement la lutte des classes. Car si vous n’êtes pas aussi abordable qu’une IA, alors vous perdez votre emploi. 10 dollars sur l’API de ChatGPT vous permet de générer environ 10 millions de mots ! C’est impossible de rivaliser.

Ce n’est pas plus mal, que ces boulots mal payés et qui recyclent les mêmes excréments disparaissent. En fait, je l’ai toujours dit aux rédacteurs et aux autres, ne vous cantonnez pas à un travail de sous-traitant, car tout le temps que vous donnez aux autres, vous ne le donnez pas à vos projets personnels. A l’époque, je disais toujours de créer des blogs, de lancer des stratégies diversifiées pour gagner du fric, mais aujourd’hui, le métier de blogueur et de webmestre va subir le même sort. En bref, les IA et ceux qui le possèdent n’ont plus besoin de nous. La plus mauvaise des IA peut écrire des descriptions de produits Amazon que le meilleur des rédacteurs.

Donc, 99 % des gens de ce secteur vont perdre son emploi et une reconversion est nécessaire. Dans ma jeunesse, j’ai transporté des fers ronds et des boites de carreaux, j’étais videur de conteneurs et la dèche actuelle est tellement démente que je pense me reconvertir, je gagnerais beaucoup plus et de manière fixe qu’en étant un rédacteur talentueux dans le monde des IA.

Vous avez une petite partie qui va survivre, mais avec des salaires proches de zéro dans le concept d’heure-travail. Cela vient de la plus abominable des théories économiques qu’on appelle ricardienne (la théorie de Ricardo). C’est la théorie dominante dans l’économie et c’est pourquoi, c’est tellement la merde. Elle stipule que ce qui est important n’est pas vos compétences, votre expérience, votre diplome, mais votre temps au travail en libre-échange. C’est à dire que si un développeur à la Silicon Valley, gagnant 120 000 dollars par an et un cireur de chaussure en Somalie, gagnant 15 dollars par mois, font du libre-échange, alors le niveau de vie des deux va s’améliorer par la magie du marché. C’est la chose la plus conne qui existe et même un enfant trisomique, issus de deux gauchistes dégénérés, n’y croirait pas, mais c’est le modèle dominant actuel.

Et c’est une variante de cette heure-travail qui va frapper le freelancing. Auparavant, qu’est-ce qui se passait ? Un client vous passait, disons, une commande de 10 textes de 2000 mots, allez, il est généreux à 10 euros la pièce (oubliez les tarifs élevés, c’était juste du fantasme). Si vous êtes bon rédacteur, vous pouvez faire un ou deux textes par jour. Aujourd’hui, je pourrais faire un texte, car je me fais vieux et contrairement à la connerie et l’avidité, la créativité est limitée. Car je fais faire mon brouillon, me documenter, refaire le texte, etc. Cela prend du temps. Le mec est content, vous êtes payé avec les intermédiaires qui ont pris 30 % de votre fric, mais au moins, vous pourrez vous payer une assiette qui n’est vide qu’à moitié. Donc sa commande, vous la terminez en 10 jours et 5 si vous êtes vraiment productif.

Aujourd’hui, l’IA peut créer ces 10 textes en environ 2 heures. Je le sais parce que je le fais pour alimenter certains de mes sites. Personnellement, j’utilise principalement l’IA pour la réécriture, la traduction (c’est plus authentique que Google Translate), la suggestion de titre, ce genre de choses. Mais plusieurs de mes sites sont à l’abandon, je suis trop fauché pour recruter des gens et je suis trop soulé pour me taper du contenu que je n’ai pas forcément envie d’écrire quand je me lève le matin. Et si ce client utilise l’API de ChatGPT, ces 20 000 mots lui couteront 0,02 euros, allez, on va être généreux, si vous utilisez GPT-4, cela vous coutera 0,5 euros au maximum. Pour ces mêmes 20 000 mots, le rédacteur demandera 100 euros, comme le dirait le professeur Moriarty : “Le combat est bien trop inégal”.

Vous ne pouvez pas rivaliser avec l’IA, ce n’est pas la peine, car vous vous battez pour la même ressource médiocre aka le contenu consumériste du web. Bien sûr, l’IA raconte souvent des conneries et au bout d’un moment, on voit ses limites, de plus, elle ne peut pas être biaisé, donc pour des textes religieux, politiques ou autre, cela ressemble à un enfant qui parle de choses sérieuses, un peu comme le sketch des Inconnus. Mais sinon à part pour des sujets sensibles, vous êtes mort.

Mais ce temps, même les deux heures, le client ne peut pas forcément se le permettre. Et comme il est grand seigneur, il vous donnera peut-être 5 euros pour ces 20 textes, car il connait le cout de la rédaction, car c’est celle d’une IA, donc, vous ne pourrez rien lui opposer en échange. C’est là où l’heure-travail va fonctionner à plein régime. Car on aura un monde où on aura une inondation de contenus, mais ceux qui le créeront, par l’intermédiaire de l’IA, seront bien plus pauvres qu’auparavant.

Quand ChatGPT est arrivé, qui a été les premiers à l’exploiter ? C’était les escrocs ! Il y avait des dizaines de vidéos de Youtube, provenant de mecs qui n’avaient jamais rien produit de leur vie, mais spécialiste de “Devenez rapidement riche” qui ont utilisé cet outil pour arnaquer les gens. L’IA est là pour arnaquer les gens avec du contenu qui a tous les déguisements de l’intelligence et de la créativité, mais c’est une coquille vide, manquant de profondeur, de personnalité, mais c’est suffisant pour le consommateur moderne à deux neurones.

Même moi, je propose ces services par IA. Je peux faire 10 textes ou plus pour environ 5 euros. Et cela montre aussi l’ignorance des gens dans la matière. Dans ces services, il y a un mec qui me contacte, disant qu’il est artisan dans le BTP et qu’il veut une masse de textes pour promouvoir ses activités en l’optimisant pour plusieurs villes en même temps. Il me demande que si je lui fourni ces textes IA, est-ce qu’il sera en première position de Google par rapport à ces villes.

Je vous avais dit que j’étais innocent et trop honnête pour ce métier, alors je lui ai dit la vérité. Que ce n’est pas parce qu’il va remplir son site avec des dizaines d’articles sur le même modèle que magiquement, Google va lui faire des faveurs. Cela dépend du site, de la compétition dans son secteur, s’il est bien optimisé, etc. Le gars m’a remercié et il a disparu. Il a dû sans doute trouver un escroc patenté Freelance Pro qui a dû lui raconter le bobard du chef : “Mais oui, monsieur, en m’achetant mon pack de 100 textes à 50 euros, je vous garantis que vous serez en première page de Google en deux semaines, je vous le garantis puisque je vous le dis !“.

Cela doit aussi nous faire comprendre que la majorité des gens ne comprennent pas comment le web fonctionne. Mais cet artisan, qui a dû découvrir l’obligation numérique avec la tyrannie covidiste, a pensé qu’il suffit de créer un site que pour les clients affluent comme des hommes déconstruits auprès de Sandrine Rousseau ! Et le mec s’est fait arnaquer en beauté.

J’ai parlé des IA de texte, mais regardez le bain de sang que c’est pour les graphistes et les artistes. Les IA d’images ont révolutionné le secteur et ils ont mis tout le monde au placard. Un an avant, on disait que jamais l’IA ne pourrait rivaliser avec les artistes, aujourd’hui, ils font mieux, gratuitement et avec une production de masse comme on a rarement vu. Désormais, tous mes articles sont illustrés avec des images d’IA. Et je ne vais pas voler le pain de la bouche d’un artiste puisque comme je l’ai dit, je suis fauché comme le blé ukrainien. Même les couvertures de mes livres, je les avais faites sous Inkscape et Gimp à l’arrache. J’aurais eu de meilleurs résultats avec l’IA à ma disposition. Je ne suis pas un artiste et donc, je ne peux pas savoir l’ampleur de l’impact, mais il doit être massif.

Et cela ne s’arrêtera pas. J’avais pressenti que la prochaine IA sera celle de l’audio et c’est confirmé. Ces IA peuvent créer des pistes de musique entière, des chansons, créer des paroles qui vont se moduler sur un certain rythme. C’est encore balbutiant et payant pour le moment, mais cela va s’accélérer à toute vitesse. Les artistes et les musiciens seront clairement les suivants, même si leurs ayants-droits vont se battre comme des chiens enragés.

Et ceux qui voulaient interdire les IA d’images par la justice, où sont-ils ? Ils ont ouvert leur gueule sur Instagram et j’avais dit que cela ne mènera à rien, car le système en place a besoin des IA pour faire la décapitation finale des emplois et automatiser ce qui peut l’être. Ainsi, son levier de chantage sera total et on devra se contenter de miettes. Bien sûr, on peut faire des voeux pieux et dire qu’on s’en sortira avec des oeuvres originales et plus créatives, mais c’est de la merde et c’est toujours de la merde enrobée de crème chantilly pour faire passer la pilule. 99 % des gens vivent de tâches pénibles, qui ne demandent pas beaucoup d’originalité et de créativité.

“Soyez votre propre patron” disaient-ils. Et ce qui fait peur est que les géants de la technologie ont fait une captation totale sur la publicité, l’espionnage capitaliste et les plateformes et les IA. Tu ne peux pas être ton propre patron si tu vis chez quelqu’un, que tu travaille pour lui et qu’il peut te mettre à la porte pour n’importe quelle broutille.

Le suicide ou la misère, choisissez votre chemin, camarade !

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Mes livres

Le Basilic de Roko	Mon parcours de rédacteur web	Science corrompue et servile	Nous, Tueurs en série