L’impasse de la médecine pour les pauvres


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  • Les progrès de la médecine continuent de se développer. Mais son cout devient exorbitant pour des raisons purement de profit et de système de brevet complètement corrompus. Cela peut nous mener vers une impasse de la médecine.


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    Les progrès de la médecine continuent de se développer. Mais son cout devient exorbitant pour des raisons purement de profit et de système de brevet complètement corrompus. Cela peut nous mener vers une impasse de la médecine.
    Image parengin akyurt de Pixabay

    La médecine nous a donné énormément de progrès. Les vaccins, les antibiotiques, la chimiothérapie, etc. Chaque maladie n’est plus une fatalité. Il y a 20 ans, on se sentait impuissant face au VIH/SIDA. Aujourd’hui, les sidéens ont une espérance de vie similaire aux personnes normales. La médecine a conquis le monde entier, mais sa pénétration est inégalitaire.

    Une médecine du marché

    Les lois du capitalisme et du marché alimentant la recherche en médecine et en médicaments nous ont fait la promesse du prix dégressif. Un médicament est très cher au début et ensuite, tout le monde peut se le payer. Le modèle semblait fonctionner, mais il est devenu pourri jusqu’à la moelle. L’industrie pharmacologie est plus opaque que celle de la mafia, de l’autonomie, du trafic de drogue.

    Quand un dealer vous vend un gramme de cocaïne, vous pouvez en déduire les couts assez facilement. Vous pouvez connaitre le cout de la plante et de l’extraction de cocaïne. Vous pouvez calculer les processus chimiques et le transport jusqu’à votre dealer. Avec des efforts, n’importe quel secteur peut nous donner les vrais prix de production. Mais pas Big Pharma. Comment on fabrique un médicament ? Quel est le cout exact de la recherche et développement ? Quel est le cout de production ?

    Que dalle, pour vous effrayer, les rapports vous disent que grosso modo, un médicament coute 1 milliard de dollars à fabriquer et 20 ans de recherche. Et c’est valable pour tous les médicaments. Mais dès qu’on tente de décortiquer ce cout étrange, qui est identique pour tous les médicaments, alors circulez, y a rien à voir. Big Pharma est un Big Business pour les Big Compagnies et il est tellement gigantesque que le secteur bancaire est un nain de jardin à côté.

    Toujours plus haut pour les prix des médicaments

    Un sondage aux États-Unis que Big Pharma est le secteur le plus détesté suivi des politiciens. Au fond d’eux-mêmes, même s’ils ne connaissent pas les tenants et aboutissants, les gens sentent qu’il y a quelque chose de pourri dans la médecine et les soins. Et que le serment de corruption a remplacé celui d’Hypocrate depuis très longtemps.

    Si on prend les médicaments, alors on se rend compte que les prix continuent d’augmenter sans aucune raison à part la voracité des actionnaires. Des médicaments, sortis en 1980, coutent 17 à 19 % plus cher en 2019. Selon la loi du marché et du brevet, ces médicaments auraient dû sortir de leurs brevets en 2000 et ainsi, les fabricants de génériques auraient pu les fabriquer en masse, divisant le prix par 10. Mais Big Pharma a plusieurs tactiques à son arc.

    Un système de brevet vérolé à l’extrême

    La première est de changer une ou deux molécules, parfois purement cosmétique, pour avoir droit à un nouveau brevet de 20 ans. Et la seconde tactique, plus récente, est de racheter les fabricants de génériques. L’Iran et la Chine sont les principaux producteurs de générique et on a des dizaines d’entreprises de générique qui se font racheter en douce par Pfizer et GSK. Et ensuite, il ne leur reste plus qu’à augmenter les prix comme ils veulent.

    Pour le moment, le secteur médical des pays riches tient le coup face à cette extorsion industrielle. Vos systèmes de santé, universels ou via les assurances, absorbent une grande partie des couts. Quand vous êtes malade en France, alors vous allez à l’hôpital, on vous soigne avec les meilleurs traitements et vous rentrez chez vous sans quasiment débourser un seul centime. Dans les pays pauvres, c’est différent. Vous crevez si vous n’avez pas une montagne de cash pour le moindre petit bobo.

    La médecine moyen-ageuse des pays pauvres

    Habitant dans ce délicieux pays qu’on appelle Madagascar, je pourrais vous parler pendant des siècles du secteur médical pauvre. Ma mère est décédée il y a une semaine. Cela a commencé il y a plusieurs mois avec la rougeole. Elle avait 74 ans. La rougeole est partie (merci à ces pustules d’Antivaxx dont la propagande touche tous les pays). La rougeole affaiblit le système immunitaire dès que vous êtes adulte. Si vous avez la rougeole au-delà de 21 ans, alors vous avez du souci à vous faire. La fièvre et les boutons vont disparaitre, mais les séquelles sur le système immunitaire sont désastreuses.

    La grippe a été particulièrement virulente pour la saison 2018/2019 et ma mère a eu une infection pulmonaire carabinée pendant des mois et si vous ajoutez à cela un coeur plus que vacillant, le manque d’exercice et une alimentation déséquilibrée, alors il y avait peu de chances de survie. Mais pour cette épreuve, j’ai eu l’occasion de voir un milieu hospitalier sans un centime.

    C’est simplement l’enfer sur terre. Vous payez pour la moindre broutille, du balayeur de la chambre jusqu’au médecin qui fait ses consultations quotidiennes. Et un médecin dans un pays pauvre n’a pas grand-chose à envier à un vendeur à la sauvette. Il va vous faire casquer le maximum une fois que vous tombez entre ses griffes.

    Tout est bon pour faire casquer le max

    Quand vous avez une personne dans un état très grave avec des difficultés respiratoires aiguës, la meilleure chose est de faire une oxygénothérapie en essayant de déboucher les poumons. À la place, ils l’ont bourré d’antibiotiques ultra-puissants (parce qu’ils étaient très chers leur permettant de se remplir les poches) et à la fin, ma mère est morte d’une crise cardiaque.

    Ils ont fait tous les examens possibles et à chaque fois, ils trouvaient une nouvelle maladie. Insuffisance cardiaque, abcès pulmonaire, cancer de la gorge, à la fin, ils parlaient même de Lupus. Une série de Dr House où la vie des personnes n’est qu’un jeu à la marelle en tentant de jeter les pierres au bon endroit.

    J’avais deux solutions. Soit, je prenais un AK47 sur le marché noir et je déboule dans l’hôpital pour administrer une extrême onction bien carabinée, soit j’essaie de réfléchir sur ce merdier mondialisé qu’est devenu la médecine.

    De la compta

    Vous pourriez me dire : C’est normal pour un pays pauvre d’avoir une médiocrité médicale abyssale. Madagascar possède des cliniques extrêmement réputées, mais comme je l’ai dit, vous devrez avoir une montagne de cash, c’est à dire des milliers de fois le salaire annuel que vous devrez renouveler chaque jour.

    Une petite anecdote pour comprendre le foutoir médical. Il y a un centre qui est plutôt performant et même si j’étais fauché, n’ayant pas mangé depuis 2 jours (car tout le fric passait à l’hosto), je voulais la déplacer dans ce centre. Je me renseigne sur le transport médical, le prix aller/retour est l’équivalent du salaire annuel malgache. Et je rajoute qu’il faut de l’oxygène à la patiente et on me répond qu’il y a un supplément. Je demande combien et là texto :

    Cela dépend de ce qu’elle consomme en débit d’oxygène

    Cette phrase n’est pas de la médecine, ni même une prestation. C’est de la comptabilité. On a abandonné la médecine aux mains des gestionnaires, des rapaces et des comptas qui doivent calculer chaque particule de bénéfice. La blouse blanche est davantage tachée du sang des patients qu’elle n’a pas voulu soigner que des opérations qu’elle a effectuées.

    Ce type de phrase nous vient de la médecine à l’américaine. Vous payez pour tout et si vous n’avez rien, soit vous vous endettez, soit vous crevez. Et on trouve cela normal dans un monde randien ou capitaliste ultra-libéral, mais avouez que ça pue la merde à des kilomètres. Et cette médecine à l’américaine est en train d’infecter le monde entier.

    Une médecine à l’américaine

    Tous les pays adoptent ce système, inégalitaire à l’extrême. Si vous êtes très riche, alors vous pourrez vivre jusqu’à 100 ans sinon, comptez sur la chance pour ne pas avoir de cancer, de fracture, de diabète, d’hypertension, de maladie cardiaque, de VIH, de rougeole, de grippe, de pneumonie et pour les accouchements, il serait plus judicieux d’investir dans un matelas.

    En France, la Sécu tient encore le coup, mais le remboursement est constamment grignoté. La gratuité reste la même, mais c’est remplacé par des assurances complémentaires. En Nouvelle-Zélande, ils avaient fait le même coup. Et ensuite, les assurances complémentaires sont devenues de plus en plus payantes.

    Et c’est là toute la sournoiserie de la médecine, alimentée par le capitalisme. Vous n’aurez pas une formule payante d’un seul coup, vous faisant comprendre que la Sécu a disparu. À la place, vous aurez une espèce d’intrication dégueulasse entre le secteur public et privé et vous allez payer des petites sommes par-ci par-là et vous ne vous en rendrez même pas compte.

    La loi des lobbys

    Et il n’y a aucune réforme à l’horizon. La moindre tentative de baisser le prix des médicaments et de consultations provoque un tollé, fabriqué de toutes pièces, par les lobbys de Big Pharma même si l’Ordre des Médecins n’est pas en reste. La médecine moderne est comme la petite maison dans la prairie. On laisse les choses dans l’état et on espère que cela tiendra un hiver épidémique de plus.

    Mais cette médecine est appelée à disparaitre. La prochaine génération nous donnera l’intelligence artificielle, les mégadonnées, la médecine personnalisée et la thérapie génique. Car il faut bien comprendre que la médecine, c’est 100 % de défaite. La médecine ne gagne jamais. Tout ce qu’elle peut vous donner, c’est un peu de temps. 1 an, 5 ans, 10 ans à tout casser.

    Le futur de la médecine pour les Crésus

    Cependant, le futur de la médecine ne va pas traiter les maladies, mais les guérir. La thérapie génique va corriger les gènes en amont et les maladies n’apparaitront même pas. Si avec le rafistolage à la tronçonneuse actuel, on paie une fortune, alors imaginez ce qu’on devra payer pour une guérison quasi miraculeuse.

    Et ce n’est pas de la science-fiction. Il suffit de prendre l’exemple du Glybera, une thérapie génique pour une maladie musculaire. Son taux de guérison est de 100 %, son cout ? 1 million de dollars. À l’heure actuelle, il n’y a qu’une seule patiente qui a en bénéficié. Le médicament le plus performant de l’histoire de la médecine est tout aussi inutile qu’une vasectomie à une chèvre.

    Mais pourquoi 1 million de dollars ? Les comptables réfléchissent de la façon suivante : Qu’est-ce que cela nous aurait rapporté si cette personne avait acheté des médicaments classiques pendant 20 ans ? 1 million ? Alors, c’est ce qu’elle doit payer pour un traitement en une seule fois.

    Et la thérapie génique est appelée à se développer, car les médicaments montrent leurs limites. La résistance aux antibiotiques, le vieillissement considérable de la population et de nouvelles maladies. La médecine qui existe actuellement dans les pays pauvres où on facture le nombre de bulles d’oxygène, consommé par un patient, va se généraliser.

    Déséquilibre démographique

    C’est-à-dire que même ceux qui se considèrent comme étant riches ne pourront pas se payer ces thérapies géniques. Cela créera un fossé de plus en plus important entre ceux qui vont crever à 40 ans comme à la belle époque et ceux qui deviendront immortels. On pourrait croire que les inégalités médicales entre pays riches et pauvres ne datent pas d’hier. Mais il y a une nouveauté. La pyramide des âges.

    L’Occident vieillit jusqu’à son extinction et la majorité des jeunes se trouve dans les pays pauvres. Si ces jeunes crèvent à cause d’une médecine bouffée par des mites comptables, alors on risque de se retrouver en déséquilibre démographique explosif. Car il n’y aura personne pour payer les couts des soins des vieux dans les pays riches puisque la main d’oeuvre sera au cimetière.

    La réforme pour changer est impossible selon moi. Les choses vont continuer à empirer dans les années à venir. Car pour carboniser les rapaces de la médecine, il faut détruire entièrement le système de brevet et ça, personne ne le fera. Les subventions et les aides diverses ne sont que des sparadraps, car le fond du problème est qu’il n’y qu’en médecine que les prix peuvent monter réellement vers l’infini. L’impasse de la médecine est que 99 % de la population mondiale ne pourra pas se payer le futur des soins. Demandez à ma mère, elle vous le confirmera.

    Moi, j’ai pris ma décision. J’ai 20 ans tabagisme dans les poumons et il est évident que le crabe a déjà reçu son carton d’invitation. Quel que ce soit mes symptômes dans les années à venir, je n’irais pas l’hosto. Cela ne signifie pas le refus de la médecine pour des petites maladies. Mais hors de question d’agoniser comme un péteux sans le sou. Au moins, le cancer vous tue gratuitement.

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

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