Le Japon a falsifié ses données sur la chasse à la baleine dans les années 1960


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    Le Japon a sciemment falsifié ses données sur la chasse à la baleine dans les années 1960. Et les impacts sur les études scientifiques concernant la population des baleines sont considérables puisqu’on doit revoir toutes les données.

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    Comme les pêcheurs, les chasseurs de baleine falsifient les résultats de leurs prises. Dans les années 1960, les chasseurs de baleine de l’URSS ont tué près de 180 000 cétacés, mais leurs rapports de l’époque étaient bien inférieurs à ces chiffres. Aujourd’hui, il semble que les chasseurs de baleine japonais ont aussi manipulé leurs chiffres dans le Pacifique du nord selon une nouvelle étude. Cette découverte, alors que le Japon va repartir pour la chasse aux baleines pour de prétendus objectifs de recherche, soulève des questions sur le comportement du Japon. Et le pire est que cette falsification invalide de nombreuses études sur la démographie et la conservation actuelle des baleines.

    Selon Andrew Brierley, un écologiste marin de l’université de St Andrews en Angleterre : C’est vraiment une superbe enquête. Elle montre que les chasseurs japonais ont ajouté un faux critère pour faire croire qu’ils chassaient uniquement les baleines d’une certaine taille. Cela leur permettait de tuer des baleines dont la taille était inférieure aux normes internationales de la pêche. Et on a détecté ces fausses données après la découverte de faux rapports sur la chasse par l’URSS. Les 2 pays, avec d’autres nations chasseuses de baleine, ont commencé à envoyer leurs chiffres sur le sexe et la longueur des baleines qu’ils tuaient à l’International Whaling Commission (IWC) à partir de 1946. Cette organisation, qui surveille la conservation et la gestion globale des baleines, a spécifié les pays qui pouvaient chasser les baleines en fonction d’une certaine quantité, mais également des différentes espèces de baleine. Mais en 1948, l’URSS est devenue un contrebandier et il a commencé à chasser illégalement les baleines. Dans les 30 ans qui ont suivi, l’industrie de chasse à la baleine de l’URSS a tué environ 178 811 baleines supplémentaires par rapport aux chiffres qu’elle a rapportés à l’IWC. Heureusement, 4 biologistes soviétiques ont gardé les vrais rapports qui ont été déclassifiés en 1990.

    En 2007, Yulia Ivashchenko et Phillip Clapham, des experts en cétacé de la National Oceanic and Atmospheric Administration de l’Alaska Fisheries Science Center à Seattle ont rejoint leurs collègues et ils ont contacté l’un des biologistes soviétiques (qui est maintenant russe) afin d’ajuster les chiffres en utilisant les vraies données de la chasse à la baleine de l’empire soviétique. Ils ont découvert que non seulement l’URSS avait pratiqué massivement la chasse illégale, mais elle a aussi ignoré les législations sur les baleines, notamment celle qui concerne l’espèce du Grand Cachalot ou Physeter macrocephalus.

    L’URSS et le Japon ont massacré des milliers de Grands Cachalots

    Étant donné que cette espèce a été massivement chassée pour son huile depuis 1700, l’IWC avait décrété que seuls les Grands Cachalots d’une longueur supérieure à 11,6 mètres pouvaient être chassés. Les Grands Cachalots mâles peuvent atteindre une longueur de 20 mètres tandis que les femelles peuvent atteindre 14 mètres. Mais les chasseurs soviétiques ont ignoré ces régulations et ils ont falsifiés les données sur la longueur des femelles ou ils ont enregistré des femelles comme étant des mâles. Et ils l’ont fait pour qu’on ne détecte pas les irrégularités sur l’huile qu’ils collectaient. Le Grand Cachalot mâle produit plus d’huile. Et en interrogeant les scientifiques russes, plusieurs d’entre eux ont déclaré que les Japonais avaient fait la même chose, mais il n’y avait pas de preuve. Finalement, un japonais actuellement en retraite qui était gestionnaire d’une station de baleine a admis que les stations du Japon ont falsifié régulièrement leurs données même après 1986 qui est l’année du moratoire sur les baleines. Pour trouver les fausses données du Japon, Ivashchenko et Clapham ont analysé les données soviétiques. Ils se sont concentrés sur la chasse des Grands Cachalots par les 2 pays, car l’URSS et le Japon chassaient dans les mêmes zones et pendant les mêmes périodes. On a trouvé rapidement une irrégularité qui est que les Japonais atteignaient leur quota chaque année alors qu’ils passaient moins de temps sur la chasse. Cela signifie que leurs chiffres officiels étaient faux.

    Une comparaison précise des 2 pays entre 1968 et 1969 sur la chasse au Grand Cachalot a révélé l’irréalisme des chiffres sur ces 2 ans. Pendant cette période, les flottes japonaises de chasse à la baleine dans le Pacifique du Nord ont rapporté qu’ils avaient harponné 1 568 femelles. Sur ces chiffres, 1525, soit 97 % étaient listés comme étant aux normes de l’IWC. En revanche, les données soviétiques ont montré que leurs chasseurs (qui chassaient dans la même zone que les japonais) avaient tué 12 578 baleines femelles et seules 141 (soit 6,6 %) étaient de la taille requise. Les rapports officiels du Japon montrent qu’ils avaient tué 141 femelles d’une taille de 12,5 mètres en 1969. Mais la même année, les Soviétiques avaient harponné 5 680 femelles et seules 2 d’entre elles avaient la taille qui a été rapportée par les Japonais. Après 1972, l’IWC a exigé que les chasseurs devaient avoir des observateurs indépendants à bord. Et les chiffres ont immédiatement chuté sur les Grands Cachalots de taille supérieure ou de la taille requise. Ivashchenko et Clapham ont publié leurs travaux dans la Royal Society Open Science.

    Une falsification qui invalide de nombreuses études

    Pour John Frizell, porte-parole de Greenpeace en Angleterre : La découverte de ces fausses données sur la chasse à la baleine est une boite de Pandore. La raison est que la population et conservation actuelle des baleines se base sur des données historiques. Et Clapham ajoute que ces fausses données sont dans la base de données de l’IWC et elles sont utilisées par les chercheurs. Combien d’études doivent être invalidées à cause de ces fausses données ? Et les chercheurs soupçonnent que si les Japonais ont magouillé avec les chiffres sur le Grand Cachalot, alors on peut penser qu’ils n’ont pas hésité à faire la même chose pour la baleine à bosses et le Rorqual commun.

    Et au Japon, aucun scientifique japonais n’est prêt à corriger ces fausses données. Selon Joji Morishita, le directeur général du National Research Institute de Far Seas Fisheries à Tokyo et un délégué de l’IWC : Nous sommes toujours ouverts à toutes les corrections sur les anciennes données, mais il ajoute que ces travaux indiquent seulement que ce sont les rapports de l’URSS qui ont été falsifiés et que le Japon n’est pas en cause. Frizell remarque que la délégation japonaise a donné des réponses similaires pendant une réunion récente de l’IWC à San Diego lorsque Ivashchenko a présenté une première version de ses travaux. Et Frizell a ajouté : Si le Japon érige un mur de brique sur quelque chose qui s’est passé il y a 40 ans, alors on doit se poser des questions sur la fiabilité de ce pays concernant ses données actuelles sur la chasse à la baleine. Et cela signifie aussi que si le Japon réussit son coup de force pour réinstaurer la chasse commerciale à la baleine, alors on doit mettre absolument des observateurs indépendants sur les navires. Parce qu’on sait ce qui se passe quand les chasseurs peuvent faire ce qu’ils veulent.

     

    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

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