Madagascar, Seychelles : Des bases militaires de la Chine et de l’Inde à l’horizon ?


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  • Plusieurs médias indiens envisagent le fait que la Chine pourrait construire une base militaire à Madagascar et l’Inde pourrait y répondre en installant sa propre base aux Seychelles. Les raisons seraient le trafic stratégique par le canal de Mozambique ainsi que l’exploitation des terres rares dans la Grande Île.


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    Plusieurs médias indiens envisagent le fait que la Chine pourrait construire une base militaire à Madagascar et l'Inde pourrait y répondre en installant sa propre base aux Seychelles. Les raisons seraient le trafic stratégique par le canal de Mozambique ainsi que l'exploitation des terres rares dans la Grande Ile.

    Le média indien Economic Times révèle que la Chine envisage de créer une base militaire à Madagascar afin de sécuriser le trafic par le canal de Mozambique, mais aussi pour garantir l’exploitation des terres rares du projet Tantalus. Mais quand on regarde le virage géopolitique du gouvernement malgache actuel, il faut pondérer cette révélation. D’une part, le gouvernement Rajoelina montre un tropisme prononcé vers l’Occident, notamment des relations plus chaudes avec les Etats-Unis, l’Union Européenne et le Japon. Ce dernier, par exemple, est le principal investisseur de l’extention du port de Tamatave.

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    Economic Times base ses informations sur le fait qu’il y a un attaché militaire à l’ambassade de Chine à Madagascar et qu’il y a des formations communes entre militaires chinois et malgaches sans oublier l’apprentissage de la langue chinoise. Mais c’est aussi le cas de la France où récemment, des militaires français ont mené des formations avec l’armée malgache. Même si la relation entre la Chine et Madagascar reste excellente, cela ne signifie pas qu’on va aller vers une base militaire.

    Parce que la question principale serait : Pourquoi faire ? Selon The Diplomat, la Chine cherche à accroitre sa présence dans le sud ouest de l’Océan Indien. Dans le nord ouest, il a déjà une base militaire à Djibouti (la seule base étrangère chinoise) et il veut combler l’autre extrémité avec une présence militaire dans le sud ouest de l’Océan Indien. Trois pays ont été envisagé, l’Ethiopie, la Tanzanie et Madagascar. Et selon toujours The Diplomat, c’est la Grande Ile qui serait privilégié par la Chine.

    La raison invoquée est que la Chine accorde une importance stratégique au trafic maritime par le canal de Mozambique. Grâce à ses investissements massifs pour construire des ports au Myanmar et au Pakistan, la Chine peut utiliser de nouvelles routes maritimes qui sont plus rapides et donc, moins chères, mais surtout, cela lui permet d’éviter le dilemme de Malacca. Ce dernier est un crainte de la Chine que ses routes maritimes passent par des pays hostiles qui pourraient facilement bloquer ses navires. Et l’importance stratégique du Canal de Mozambique est connue de toutes les grandes puissances. C’est la raison pour laquelle le Japon a balancé 400 millions de dollars sur les 600 millions pour agrandir le port de Tamatave.

    La seconde raison est la sécurisation de l’exploitation des terres rares à Madagascar. On estime que le pays possède 1,2 % des gisements de terres rares dans le monde. On pourrait trouver ça ridicule, mais ces minerais portent bien leur nom. Même si on les trouve un peu partout, il n’y a que quelques pays qui possèdent des concentrations suffisantes. Et surtout que comme les stocks s’épuisent rapidement, il faut trouver de nouveaux gisements d’où l’intérêt pour Madagascar, mais également de l’Afghanistan. Cependant, le projet des terres rares à Madagascar est un vieux éléphant blanc qui a dû mal à se concrétiser.

    Ce sont d’abord les allemands qui mettent la main dessus avec le projet Tantalum Rare Earth (Tantalus). Mais l’exploitation est un cauchemar, car le principal gisement se trouve à Ampasindava, une presqu’île à coté de Nosy-Be qui n’a pas de routes ou d’infrastructures dignes de ce nom. Ayant jeté l’éponge, les schleus le refilent au chinois CNMC (China Nonferrous Metal Mining Group) en 2019 pour une exploitation potentielle de 3000 tonnes par an. Selon les estimations, on aurait environ 562 000 tonnes d’oxydes de terres rares à Madagascar. Mais encore une fois, on est loin de la coupe aux lèvres, car vu les défis de logistique et environnementaux, il faudra attendre des années avant une possible exploitation commerciale. Mais les chinois ont l’habitude de planifier sur des décennies.

    Et dès qu’il y a eu les rumeurs de cette base militaire chinoise à Madagascar, l’Inde veut répondre à la bergère. Et en fait depuis des années, l’Inde tente d’installer une base militaire aux Seychelles sur Île de l’Assomption. Au début, c’était juste un partenariat informel afin de réparer et approvisionner les navires indiens en carburant. Mais ensuite, c’est devenu un projet d’une base de 500 hommes avec toutes les infrastructures. Le projet a reçu un NON massif de la population seychelloise qui y a vu une menace sur sa souveraineté et surtout, que l’archipel soit entre le marteau et l’enclume dans l’affrontement titanesque entre la Chine et l’Inde.

    Après le refus des Seychelles, les indiens se sont rabattus sur l’île d’Agalega, faisant partie de la république de Maurice. Cependant, c’est un second choix puisque cette île est plus éloignée du canal de Mozambique. Cependant, l’Inde espère toujours du coté des Seychelles. Un nouveau président, Wavel Ramkalawan, faisant partie de l’opposition, a pris le pouvoir en 2020 aux Seychelles et c’est la première alternance politique depuis l’indépendance de l’archipel en 1976. Et les Seychelles ont un grand besoin d’infrastructures et cela dépendra de la finesse diplomatique indienne et de la grosseur de ses chèques, mais l’éléphant pourrait négocier une présence militaire dans le futur.

    On ignore si la base chinoise à Madagascar est juste des extrapolations malvenues des médias indiens, mais s’il y a quelque chose en préparation, alors le gouvernement malgache devra aussi faire preuve de doigté pour que ça ne parte pas en vrille.

    Et quand on parle de flingues et d’uniformes, alors on peut être certain que les Yankees ne sont pas loins. Les Américains voudraient aussi installer une base militaire à Madagascar, notamment à Diego-Suarez. Cette ville dans le nord de Madagascar a quand même été créé par les français pour être la principale force maritime dans l’Océan Indien. Les américains comme de nombreux pays se sont aperçu de la vulnérabilité du canal de Suez où un seul navire peut bloquer 20 % du trafic maritime mondial. Donc au delà des terres rares, c’est le trafic par le canal de Mozambique qui intéresse toutes les grandes puissances.

    2022 est le 50e anniversaire des relations entre la Chine et Madagascar et il sera célébré dans quelques semaines et peut-être qu’à cette occasion, on aura une annonce importante, mais pour le moment, il faut considérer ces informations avec le grain de sel nécessaire. Cependant, une chose est sûre, Madagascar et les autres pays de l’Océan Indien sont amené à être ballottés par le jeu des grandes puissances, car leur survie dépend du contrôle de leur trafic maritime.

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    Houssen Moshinaly

    Rédacteur en chef d'Actualité Houssenia Writing. Rédacteur web depuis 2009.

    Blogueur et essayiste, j'ai écrit 9 livres sur différents sujets comme la corruption en science, les singularités technologiques ou encore des fictions. Je propose aujourd'hui des analyses politiques et géopolitiques sur le nouveau monde qui arrive. J'ai une formation de rédaction web et une longue carrière de prolétaire.

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